AGORAMANIA : des grands espaces de Provence à la wilderness d'ailleurs
Des +6400 m de Bolivie aux -400 m de Jordanie, des monastères perchés des Météores aux églises troglodytes d'Abyssinie, des mosquées d'Ispahan aux dômes nervurés de Samarcande, du sable blanc du Nouveau-Mexique aux pitons gréseux du Hoggar...
Retour au départ du col Sainte-Anne vers ce beau secteur du massif de l’Etoile découvert en juin 2019, avec son petit chaos dolomitique doté de formations géologiques insolites : alignements d’aiguilles karstiques, grottes traversantes, rocher en forme de Tombeau… et d'intérêt patrimonial pour son arche transformée en chapelle et ses antiques sentiers muletiers tracés dans la garrigue.
les aiguilles de dolomie au-dessus de la grotte
dans la grotte dite du facteur et sa petite chapelle
le sentier en corniche en-dessous et ses grottes traversantes
Ci-dessous le texte intégral - hors topos - de l'article paru dans le numéro 50 de Ski Rando Magazine sur ma virée à skis autour d'Andalsnes en mars 2022 :
Envie d’une parenthèse dans le quotidien parfois un peu étriqué du métro/boulot/dodo ? Pas envie de retrouver votre voisin de palier en voisin de serviette dans un club de vacances exotique aux allures de camp fortifié, ou de vous enfermer à Sarcelles-sur-Neige pour y prendre le métro alpin ?
Pour assouvir vos fantasmes de sea, snow and sun, allez donc plutôt mettre le cap sur la côte norvégienne, là où trace de montée aux allures de piste de ski de fond et combe de descente plus bosselée que la piste rouge des chamois à SuperTruc-les-Alpes ne seront plus qu’un lointain souvenir (mais vous serez peut-être plus gâté en snow qu’en sun…) !
La Norvège offre aux skieurs adeptes de vues mer les milliers de kilomètres de sa côte ouest découpée en fjords, d’anciennes vallées glaciaires envahies par l’Atlantique qui prennent la forme de bras de mer encaissés. C’est un plaisir un peu terni de frustration que de naviguer devant un écran sur les cartes locales, tant de belles pentes skiables et sauvages et si peu de temps… et encore moins de créneaux météo dans cette région très humide.
Alors pourquoi viser pour votre virée septentrionale de l’année les fjords de Molde, Romsdal plutôt que les centaines d’autres envisageables, et notamment ceux plus connus en France des Lofoten ou des Alpes de Lyngen beaucoup plus au Nord ? Peut-être pour réduire le déplacement de plus de 1000 km, sa durée, son coût et son bilan carbone, un argument qui ne saurait laisser indifférent dans ce pays chantre de l’écologie politique (mais gros exportateur de pétrole et de gaz !). Vous pourrez également terminer le trajet en train ou en voiture depuis l’aéroport d’Oslo, beaucoup mieux desservi que ceux de Harstad ou Tromso. Les aurores se feront moins fréquentes et spectaculaires sous ces latitudes moins boréales que dans le grand Nord Végien, mais vos journées seront plus belles que vos nuits, avec ici comme ailleurs des sessions de ski au-dessus des vallées noyées en U, et ici comme pas ailleurs un vivier de couloirs exceptionnel en regard de leur ampleur et facilité d’accès.
La vallée de Romsdal, célèbre en Norvège pour le Mur des Trolls qui ferme sa rive gauche, est en effet bordée de grandes parois de granite coupées de couloirs sur les vingt km de son extrémité aval, et sa rive droite notamment offre des lignes superbement encaissées, aisément repérables, observables et atteignables depuis la route du fond de vallée. On y profite donc de longues entailles de neige entre granite et cascades de glace, le tout à seulement quelques centaines de mètres d’altitude - pile au-dessus de la route du fond de vallée, et de conversions ou virages juste à côté d’épées et de stalactites de glace bleutée rares en ski, de quoi goûter à l’ambiance cascade de glace sans acide lactique dans les avant-bras, et sans adrénaline lorsqu’il faut lâcher un piolet pour tenter de visser sa broche dans la glace cassante !
Plus à l’ouest, au-dessus d’Isfjorden notamment, c’est le domaine des courses plus classiques, avec des routes (à péage) dégagées tout l’hiver qui s’élèvent de quelques centaines de mètres au-dessus des fermes à saumons. Au départ de ces parkings d’altitude on peut donc échapper au dur boulot de la trace dans les bouleaux sous 400 mètres, et atteindre des sommets aux formes douces de plus de 1000 mètres, sans jouer des coudes et des bâtons dans la forêt de basse altitude.
Vous y croiserez d’ailleurs beaucoup de locales et de locaux le week-end. Si votre parade nuptiale à base de dessins de belles courbes dans la poudreuse n’aura pas été récompensée avec le ou la grand.e blond.e de vos rêves, et à défaut d’ « histoire d’O » avec celle ou celui-ci, vous trouverez ici… des « histoires d’eaux ». De l’eau sous toutes ses formes, couleurs et phases : des lacis des fleuves d'eau salée des fjords aux pastilles blanches des lacs gelés, des cascades de glace blanche et bleue sous les falaises aux torrents impétueux ou figés par l’hiver, des neiges dans leur infinie variété aux nuages de vapeur d’eau - qu’il est parfois difficile d’éviter dans ce climat humide !
Encore plus vers le couchant, cette fois littéralement… entre les fjords, on peut facilement improviser des itinéraires depuis les routes côtières - avec départ dans les forêts de bouleaux ou la tourbière, puis profiter des combes et couloirs d’altitude avec vues panoramiques sur les fjords et le grand large.
C’est le ski à ambiance maritime qui fait le sel du ski en Norvège, mais sur des montagnes à peu près inconnues, où vous croiserez plus de lagopèdes que d’humains, de quoi conjurer le temps qui file en vous fabriquant de la matière mémorielle. Après le temps répétitif du quotidien, parfois presque transparent, c’est en montagne qu’on trouve ce temps suspendu au sens propre et figuré, ce temps court dans le calendrier mais long et profond par les traces qu’il laisse dans les sens et la mémoire. C’est quand le bruit de la ville devient le silence de la montagne que le son sort du bruit de fond et que le silence devient bruit ; l’oreille enfin libérée du brouhaha urbain se concentre sur le coassement d’un chocard ou le cristal d’une stalactite de glace qui s’effondre. L’hiver exacerbe encore plus l’acuité des sens, avec la neige qui lisse les sons et étouffe les reliefs, lorsque sur le grand manteau blanc les seuls motifs sont ceux laissés par les pattes d’un lagopède et le seul son est le chuintement du vent. C’est peut-être dans cette austérité et ce dépouillement, cette isolation sensorielle qui n’en est pas une, cette vie limitée à une ligne tendue entre un point de départ et un sommet, qu’on trouve une liberté qu’on a perdue dans le quotidien matérialiste et encombré ; pourquoi va-t-on en montagne : « pour s’échapper de prison », dirait Ludwig Hohl (cf. son très beau roman « Ascension »)…
Trêve de philosophie à trente centimes d’euros, la Norvège ne se limite pas à ses lagopèdes et à ses vents ; c’est aussi un pays avancé où modernité et vie traditionnelle se côtoient pour le plus grand plaisir des yeux. Aux impressionnants ouvrages d’art des routes côtières – ponts suspendus et tunnels de plusieurs kilomètres - succèdent imperturbablement les petits villages d’éleveurs et de pêcheurs avec leurs maisons colorées en bois et leurs antiques stavkirke ; aux enclos des moutons qui s’ébrouent dans les champs répondent les disques des fermes à saumons quelques centaines de mètres au large, bref autant de quoi rendre les approches routières plus intéressantes !
Les suggestions d’itinéraires ci-dessous vous donneront un fil d'Ariane dans le labyrinthe de fjords, et si sur les cartes locales vous vous sentez lost in translation entre les store, tinden et autres vatnet, il vous restera toujours le viatique des topos ci-dessous à la recherche de la plus belle ligne ou du plus beau point de vue !
EN PRATIQUE
Période
La meilleure période s’étend de mi-février à mi-avril au plus tard, mi-février pour disposer d’une durée de jour suffisante et mi-avril pour une neige encore présente et pas trop dégradée à basse altitude.
Sites de prévisions nivo-météorologiques
L’enneigement de cette région située à plus de 60° de latitude nord peut être plus capricieux que sa position septentrionale le laisserait penser, la faute au Gulf Stream qui apporte un climat océanique doux. Même au cœur de l’hiver, ces montagnes d’altitude modérée partout inférieure à 2000 mètres -la plupart des départs de rando se faisant au niveau de la mer – ne sont pas à l’abri de redoux pluvieux altérant l’enneigement tant quantitativement que qualitativement.
Il est judicieux de vérifier sur le Web les conditions d’enneigement avant le départ, d’autant plus que la Norvège offre un site de suivi de l’enneigement exceptionnel, unique au monde à ma connaissance par la densité de son maillage spatial : www.senorge.no/map. Ce service donne et prédit l’épaisseur et la qualité du manteau neigeux sur l’ensemble du territoire norvégien, avec un pas de seulement quelques centaines de mètres de largeur !
Le site http://www.varsom.no/en/ fournit quant à lui une estimation des risques naturels, dont un bulletin actualisé quotidiennement pour les avalanches, avec là également un maillage géographique par massif très fin, et une richesse d’informations qui n’a rien à envier à celle de ses homologues français ou suisses.
Pour la prévision météorologique, on peut comme toujours surfer sur www.meteoblue.com (qui donne accès aux sorties de nombreux modèles météo différents) ou sur le site local https://www.yr.no/en
Formalités administratives
La Norvège fait partie de l’espace Schengen mais pas de l’Union Européenne ; une carte d’identité suffit pour rentrer sur son territoire. Il est malgré tout recommandé de vérifier les conditions de voyage sur le site « conseils aux voyageurs » https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs/conseils-par-pays-destination/norvege/, qui vous informera entre autres d’éventuelles restrictions sanitaires encore/à nouveau en vigueur.
Comment y aller
Pour rejoindre Oslo le plus rapide est bien sûr l’avion, de nombreuses compagnies desservant la capitale norvégienne depuis Paris ou les métropoles de province. A noter que chez Lufthansa le transport du matériel de ski (planches + chaussures) est… totalement gratuit !
Pour les intégristes du bilan carbone, il est possible de gagner Oslo en train, compter plus de 24 heures de voyage et quelques correspondances, mais le charme d’une montée progressive en latitude…
Se déplacer
Il est possible et facile de rejoindre Andalsnes depuis Oslo ou son aéroport en train (1 ou 2 changements, correspondance courte), de là il doit par contre être difficile de se passer de voiture particulière.
On trouve évidemment des locations de voiture à l’aéroport d’Oslo, aisément mais chèrement (les pneus neige étant évidemment de série en Norvège).
Ici encore plus qu’ailleurs, attention à bien respecter les limitations de vitesse, question de sécurité routière mais aussi… financière avec de nombreux radars et des amendes pour excès de vitesse qui chiffrent bien au-delà des 500 euros !
Budget
C’est là que le bât blesse, ou plutôt que le… bas de laine souffre ! La Norvège est un pays cher, aux niveaux de vie et salaires élevés, et qui importe une grande partie de ses biens de consommation. Même le carburant dans ce pays parmi les plus grands producteurs au monde de pétrole et de gaz affiche un prix bien plus élevé qu’en France.
Et inutile de noyer votre chagrin de « nouveau pauvre » dans l’alcool, les bières se vendent ici près de 5 euros en supermarché !
Vous faudra-t-il pour autant souscrire un crédit à la consommation et mettre votre maison en gage ? Non, car des solutions existent pour ne pas être trop au sud à l’ouest financièrement à votre retour, comme expliqué ci-dessous !
Hébergement
L’hôtellerie classique est chère, mais on trouve souvent des campings qui proposent des bungalows à tarif raisonnable (compter environ 100€/nuit pour 2 à 4 personnes). Autre option envisageable pour celles et ceux qui ne paient pas l’ISF : les hébergements du type location chez des particuliers (comme airbnb pour ne pas le citer), où l’on peut trouver des chalets pour 2 à 4 personnes pour 150 à 250 €/nuit, ambiance cosy et vue sur les montagnes et/ou le fjord inclus.
Pour ces deux familles d’hébergements les cuisines intégrées permettant de se faire à manger réduiront un budget restauration qui pourrait sinon vite s’élever (compter 15 à 20 euros pour une pizza, et 10 euros pour un sandwich) !
Dans le numéro 51 de Ski Rando Magazine qui vient de paraître (février - mars 2023), un article sur ma virée à skis en Grèce centrale et dans le Péloponnèse, une belle occasion en cet hiver 2022 pauvre en neige dans les Alpes de chausser à 800 mètres d'altitude au-dessus de la Mer Egée !
Itinéraire : col de Vergio - antécime sud-est de la Pointe de Cricche - bergerie de Casterica - antécime sud-est de la Pointe de Cricche - col de Vergio
Sommet : 2000 m
Dénivelée : 800 m (1500-2000-1700-2000-1500)
Difficulté : 3.2
Dernière courte virée à skis de cette semaine corse avant le retour au ferry de l’Ile-Rousse. La pointe de Cricche – ou plutôt son antécime sud-est, le sommet principal étant rocheux - s’atteint par un itinéraire court et direct depuis le col de Vergio, seulement 500 mètres de dénivelée adaptés à un créneau réduit. On peut rajouter la balade par une descente versant sud-ouest vers les bergeries de Casterica, mais le plus beau cadre se trouvera juste au-dessus du col dans un chaos de blocs granitiques creusés de taffonis !
à la montée, blocs de granite et vent sur l'arête sud-est de la Pointe de Cricche
à la descente versant sud-ouest vers les bergeries de Casterica
au départ de la dernière descente, au fond le lac de Calacuccia
taffonis au-dessus du col de Vergio
sur la route du retour, séance séchage des affaires...
Itinéraire : point coté 1059 sur la D318 après Calasima - bergerie de Ballone - Bocca Rossa (dépôt des skis) - Punta Minuta en aller-retour
Sommet : 2550 m
Dénivelée : 1500 m (1050-2550-1050)
Difficulté : 3.3 jusqu'à Bocca Rossa, 4.2 expo 4 si ski depuis la Punta Minuta
Après le couloir ouest face ouest de la Punta Minuta 3 jours plus tôt, retour sur ce sommet par son versant sud et le refuge de Tighiettu. C’est un beau et long vallon que celui des bergeries de Ballone au départ de Calasima, sous un couvert forestier qui s’amenuise à mesure que l’on monte, avec comme souvent en Corse de très beaux exemplaires de pins laricio en sortie de pinède. La montée se fait ensuite beaucoup plus directe sur une écharpe sud à la pente soutenue, l’occasion de monter 850 m en 1h10 (plus quelques attentes) de traçage intégral, écharpe un peu exposée sur le haut sur des pentes convexes au-dessus de barres rocheuses. Une fois parvenus à Bocca Rossa (déjà atteint à skis en mai 2009 et mai 2010) on finira en crampons jusqu’au sommet de Punta Minuta sur des pentes suspendues, encore un sommet majeur de Corse atteint cette semaine, avec vue plongeante sur la citadelle de Calvi devant le Mercantour ! La descente se fera beaucoup trop tard par rapport à l’heure optimale de cuisson de la neige, de quoi chauffer les cuisses avant le long retour par la piste, heureusement suffisamment enneigée jusqu’à la voiture.
vers la bergerie de Bellone et à travers le ruisseau de Crucetta
à la montée dans la rampe sud de Bocca Rossa
vue de la Punta Minuta vers la Grande Barrière et Calvi
descente en crampons de Punta Minuta à Bocca Rossa
à la descente dans l'écharpe sud de Bocca Rossa
dans le vallon de Tighiettu face à la Grande Barrière
Itinéraire : le Fer à Cheval sous le col de Vergio - bergeries de Radule - vallon du Golo - refuge de Ciuttulu di i Mori - cheminée d'hiver - Paglia Orba - cheminée d'hiver - funtana di Monti Nielli - Punta di Tula - funtana di Monti Nielli - vallon du Golo - bergeries de Radule - le Fer à Cheval sous le col de Vergio
Sommet : 2550 m
Dénivelée : 1600 m (1300-2550-1800-2150-1300)
Difficulté : 4.3 expo 3 pour la cheminée d'hiver, non skiée intégralement ce jour avec une vingtaine de mètres de 2 m de large ou moins
Retour au ski après la pause grimpe de la veille, cette fois en adret pour profiter de la neige transformée par 5 jours de soleil depuis les chutes du samedi. On visera la Paglia Orba, sommet majeur de Corse (déjà atteint à skis en 2011 mais dans le nuage) pour sa position excentrée et proche de la mer et sa géologie insolite (un plateau sommital entouré d’une couronne de falaises de conglomérat, face au grand rocher troué du Capu Tafunatu). La cheminée d’hiver qui mène à ce plateau suspendu s’atteint par les bergeries de Radule et leurs magnifiques pins laricio puis le long vallon du Golo. Elle passera ce jour aisément en crampons, moins facilement à skis avec un passage large de moins de 2 mètres sur une vingtaine de mètres de longueur, dans une neige déjà transformée en profondeur. Plus haut c’est l’enchantement du plateau suspendu avec ses vues plongeante sur la Méditerranée dorée au sud-ouest, plus sombre à l’ouest vers le Capu Rossu et la frange blanche des sommets du Mercantour au nord-est. La pause contemplative au sommet sera d’ailleurs si longue que la descente se fera dans une neige un peu trop revenue, ce qui sera vite oublié dans la descente en poudreuse parfois un peu soufflée face ouest de la Punta di Tula.
vers les bergeries et la cascade de Radule avec leurs beaux pins laricios
dans la cheminée d'hiver puis sur le plateau suspendu sommital de la Paglia Orba, au fond le Capu Rossu
au sommet, la croix et vue vers le Mercantour
les vues de mer de la descente sur le plateau suspendu
passage en crampons puis retour au ski sous la cheminée d'hiver
la descente au-dessus de l'épaule de Foggiale en transformée un peu trop revenue, ses vues mer sous les falaises de conglomérat et ses traces
remontée à la Punta di Tula devant le Capu d'Orto
le Capu Tafunatu et son énorme trou
vieille poudreuse à la descente de la Punta di Tula
Après les 4 journées de ski précédentes passées sur les skis, petit intermède rocheux ce jour dans le désert des Agriates, l’occasion de reposer les mollets et les cuisses au détriment des biceps ! La voie du jour se mérite par une bonne heure d’approche à la recherche des cairns salutaires dans le maquis, puis remonte une succession de murs et d’éperons discontinus reliés par des portions de marche, mais pourquoi donc me direz-vous ? Pour le magnifique granite de la voie, sculpté comme jamais en taffonis, et même presque fantasmagorique dans L1 et L5, où le rocher tridimensionnel se découpe en gargouilles, arches et vagues, une formidable exposition géologique que l’on peut découvrir en chaussons d’escalade. Celle-ci est d’ailleurs donc hétérogène, avec seulement une poignée de pas au-dessus du 5c, tous bien protégés (voire artifables) par des points à demeure (pitons ou même plaquettes), à l’exception peut-être du pas de 6a+ de L2, évitable par l’arête à droite, rendant l’itinéraire accessible à des grimpeurs dans le 5 sup. Une pette poignée de sangles et de friends petits à moyens suffit largement !
Dans ce registre de difficultés c’est une voie donc incoutournable dans ce coing pour la beauté de son caillou et de ses vues vers le Cap Corse, la mer derrière la plage de Saleccia et le désert (bien vert en hiver !) des Agriates.
l'approche entre vigne et arbousiers encore en fruits
l'inselberg de granite et le départ de la voie
L1
L2
L3
sortie de L4
départ de L5
marche vers les 2 dernières longueurs menant au sommet
Itinéraire : station de ski d'Asco - versant est de la Punta Missoghiu - descente vers 1900 m sous la brèche au sud de la Punta Stranciacone - brèche au sud de la Punta Stranciacone - fond du vallon à la cote 1800 m - couloir ouest de la Punta Minuta - station de ski d'Asco
Sommet : 2450 m
Dénivelée : 1400 m (1400-2000-1900-2050-1800-2450-1400)
Difficulté : 4.2 pour le couloir ouest de la Punta Minuta
La moisson de belles journées de ski se poursuit ce jour au-dessus de la station d’Asco. Après une mise en bouche vers les Punta Missoghiu et Stranciacone, on y trouvera peut-être l’apothéose ou le crux esthétique du séjour avec une ambiance exceptionnelle dans le couloir ouest de l’antécime nord de la Punta Minuta, juste au-dessus de Bocca Tumaginesca, couloir déjà skié en 2011. De la poudreuse épaisse sous des parois totalement givrées au-dessus du couloir qui plonge vers les abîmes du Cirque de la Solitude, avec en toile de fond les nuages bas au-dessus de la mer, une ambiance mémorable aux confins de la Patagonie et de la Méditerranée, le tout comme toujours en Corse dans une montagne vierge de trace et de toute présence humaine. De la neige rapportée par le vent dans le couloir ouest nous fera douter vis-à-vis du risque de plaques, mais tout se sera avéré bien stable finalement sous les spatules, mais pas au-dessus avec de nombreuses chutes de glaçons dues au soleil donnant l'après-midi sur les parois givrées ; le casque n'aura pas évité quelques hématomes... ailleurs que sur le crâne !
Sous le couloir la neige se fera plus soufflée, mais portante avec un excellent grip, plus bas dans le vallon le vent et le soleil ont fait pas mal de dégâts avec une neige très hétérogène, le signe qu’il est temps de viser les adrets pour profiter de la neige transformée qui commence à être portante le matin…
les laricios au-dessus de la station
tentative versant est de la Punta Missoghiu, trop de glace et pas assez de neige
descente vers le bas de la brèche au sud de la Punta Stranciacone
granite doré par le lichen puis ambiance givrée à la brèche au sud de la Punta Stranciacone
descente de la brèche
montée dans le couloir ouest de la Punta Minuta
poudre et grosse ambiance dans la descente du couloir ouest de la Punta Minuta
Itinéraire : Castiglione - cabane d'Alsato - vallon de Terrivola - grotte de la Scaffa - Cima a i Mori en aller-retour
Sommet : 2200 m
Dénivelée : 1650 m (750-700-1350-1300-2200-1300-1350-700-750)
Difficulté : 2.2
Au-delà de l'assonance du titre, un petit concentré de Corse sur un itinéraire déjà peu classique en été mais sans doute très rarement skié vu l'altitude du départ et le caractère peu skiant des 700 premiers mètres de dénivelée. J'avais repéré cette randonnée en mode estival, attiré par la beauté des groupes d’aiguilles granitiques de Popolasca et Rundinaia et le vallon de Terrivola qui se fraie un passage à travers cette forêt de pics, mais l'enneigement skiable actuel débutant dès 1000 m présentait une opportunité à ne pas rater...
Après avoir joué au sanglier dans le maquis parfois impénétrable, progressant sur un sentier de moins en moins marqué entre cistes et broussailles épineuses, on remonte donc ce magnifique vallon glaciaire enserré entre les aiguilles creusées de taffonis et d'arches (un petit air de Bavella en Haute-Corse), puis une large combe est plus ouverte et panoramique sur la mer et l’île d’Elbe loin à l’est. On retrouve au sommet à l’instar de la veille les rochers couverts de givre et la vue panoramique sur la mer au-delà des montagnes, et à la descente de la grosse poudreuse jusqu’à la grotte de Scarffa, avant de trouver du ski combat voire survie entre 1350 m et 1050 m, sans sous-couche portante et littéralement sur le maquis d'épineux et de broussailles mal recouvert.e.s.
Quoi qu’il en soit, encore et toujours une sortie majeure pour sa beauté et son caractère sauvage, en grosse poudreuse ce jour sur le haut avec vue le Mercantour ou l'île d'Elbe (loin !) devant les spatules. Pour les amateurs de Corse sauvage qui ne rechignent pas au portage voire au bartassage...
les aiguilles de Popolasca vues depuis Ponte Leccia
le village de Castiglione sous les aiguilles de Rundinaia, point de départ du jour
départ dans le beau village perché de Castiglione à ... 700 m
sur le sentier communal puis dans le maquis
dans le magnifique vallon de Terrivola sous les aiguilles de Rundinaia et de Popolasca creusées de taffonis
dans les pentes terminales, au fond l'île d'Elbe
panorama sommital vers la plaine orientale puis vers le lac de Calacuccia et le Rotondo
poudre dans la pente nord puis la combe est
retour dans le vallon, ses aiguilles et ses arches
derniers virages à ... 1100 m puis portage devant le village de Castiglione 400 m plus bas
Itinéraire : col de Vizzavona - bergeries des Pozzi - Punta Grado - Punta Scarpiccia - Punta dell'Oriente - face nord par le canyon - Punta Grado - bergeries des Pozzi - col de Vizzavona
Après le ski entre les pins laricio et bouleaux de la veille avec une ambiance canadienne dans une poudreuse sans fond et une forêt dégorgeant de fraîche, on garde la peuf (toutefois en moindre quantité) mais retrouve le soleil ce jour au-dessus du col de Vizzavona, vers la Punta dell’Oriente. On profitera là encore de grand ski mais également d’une très belle ambiance sur les rochers plâtrés de la crête sommitale, un petit air de Patagonie avec vue sur la Méditerranée.
A la descente la poudreuse un peu soufflée dans la face nord se fera progressivement plus meuble jusqu’à devenir profonde et légère au-dessus du canyon puis dans la hêtraie du bas, magnifique avec la fraîche qui recouvre les branches horizontales mais aussi les troncs verticaux, de la collante pourtant bien skiante !
Encore une journée exceptionnelle de ski de poudreuse, qui plus est sous le soleil entre le
plafond nuageux à 1800 m le matin se désagrégeant vers 11h et la cumulification englobant le versant nord vers 14h30, et avec un risque d’avalanches qui bien qu’annoncé à 3 nous a semblé plus faible sans le moindre signe d'instabilité entrevu.
dans la montée à la Punta Scarpiccia, dans le brouillard et la forêt givrée
sortie du brouillard à la Punta Scarpiccia
ambiance Patagonie dans la montée finale à la Punta dell'Oriente