AGORAMANIA : des grands espaces de Provence à la wilderness d'ailleurs
Des +6400 m de Bolivie aux -400 m de Jordanie, des monastères perchés des Météores aux églises troglodytes d'Abyssinie, des mosquées d'Ispahan aux dômes nervurés de Samarcande, du sable blanc du Nouveau-Mexique aux pitons gréseux du Hoggar...
Découverte de l’Aven du Grand Pendu sur l’extrémité orientale du Siou Blanc, le haut-lieu de la spéléologie dans le Var avec ce plateau karstique truffé d’avens au développement vertical mais aussi de galeries concrétionnées. L’Aven s’atteint rapidement par une randonnée d’une petite demi-heure sur la piste de Valbelle ; il se situe une cinquantaine de mètres au-dessus de la piste, au nord, après son croisement avec le sentier au balisage bleu.
Des pins entourant le puits permettent de pallier aisément à l’absence de spits et de descendre une douzaine de mètres jusqu’au fond de l’aven, dont les parois richement concrétionnées autour du puits de lumière ouvert sur le ciel offrent un magnifique tableau pas si fréquent en spéléologie. Je dérangerai durant mon rappel de descente une chouette hulotte qui s’envolera en survolant en rase-mottes le départ du rappel, l’occasion d’une rare observation naturaliste pour ceux restés en haut !
La galerie développée depuis le fond de puits, dite du « pied en trop », d’accès pas si aisé (quelques pas d’escalade un peu exposés), offrira un beau concrétionnement dense et varié, mais pas d’excentriques ou de fistuleuses, l’absence de tout écoulement confirmant la nature fossile de la cavité.
La virée sera complétée par la courte balade vers le bien-nommé éléphant de pierre près de l’Abîme des Morts, un karst local décidément bien travaillé, autant sous terre qu’à la surface !
l'aven et son puits rarement concrétionné
dans la galerie fossile mais richement concrétionnée du "Pied en Trop"
remontée sur corde
sur l'éléphant de pierre, qui a laissé quelques arbouses
Découverte d’une cavité facile d’accès des Alpes-Maritimes mais au concrétionnement riche et bien préservé : la grotte des Caranques au début des gorges du Loup au-dessus de Gourdon. On l’atteint par un sentier peu marqué dré dans l’pentu qui part du croisement des D3 et 603. Une petite désescalade puis un court boyau étroit mais surtout humide (mais pas une châtière) mènent à une grande galerie descendante d’une centaine de mètres dotée de gros volumes - dont une énorme méduse suspendue - mais aussi des spéléothèmes variés, dont un plafond de centaines de fistuleuses et quelques excentriques près de l’entrée de la galerie et de ses courants d’air. C’est superbe et généralement bien préservé (des rubalises étant censées canaliser les visiteurs) malgré un accès non technique (aucune corde nécessaire), la raideur du chemin de montée et le boyau d’entrée permettant sans doute de réguler la fréquentation !
à l'entrée, après le raide sentier d'accès
le passage bas d'entrée, pas trop étroit mais humide ce jour
le corridor donnant accès à la suite de la grotte
sous la grande méduse centrale
les fistuleuses de la partie supérieure de la grande galerie
Itinéraire : le Gapeau - retenue de l'Evoué - aiguilles de Valbelle - l'Ubac de Valbelle - le Castellet d'Arnoux - les Galères - Baume des Lumes - Citerne Neuve - aiguilles de Valbelle - Chemin de la Sauvelle (beau monotrace de descente) - le Gapeau
Dénivelée : environ 700 m
Après 3 semaines de vacances dominées par de l’alpinisme dans l’Oisans, de la randonnée au Kazakhstan puis le combo kayak/plongée sur la côte méditerranéenne, retour sur la selle vers le Siou Blanc, dans la Provence verte où forêts de feuillus, fleuve pérenne (le Gapeau qui se jette dans la Méditerranée et peut donc revendiquer ce titre) et lac tranchent avec l’aridité de l’ouest des Bouches-du-Rhône. L’itinéraire du jour adapté à la fermeture estivale de la route du Siou Blanc permet de gagner relativement vite le secteur des Aiguilles de Valbelle et son décor presque dolomitique sous le chaos d’aiguilles de calcaire des Friginiaires, puis celui des Baumes des Lumes par une piste manifestement récemment refaite à neuf. Cette zone a malheureusement été récemment défrichée voire dévastée par des engins de chantier, sans doute dans le cadre d’un projet encore non abouti d’implantation d’éoliennes (quel gâchis en cet endroit si sauvage), et la carte IGN n’est plus à jour en ce qui concerne le tracé de sentiers. Un peu de galère(s) donc tout près du lieu-dit « les Galères », avant de retrouver le beau monotrace qui redescend vers la piste de « Citerne Neuve » et passe tout près de l’entrée de la Baume des Lumes. Une longue cavité (développée de près de 100 mètres) non technique, richement concrétionnée (avec notamment des spéléothèmes noirs) même si très dégradée, dotée d’ailleurs de nombreuses vieilles inscriptions datant de jusqu’au début du dix-neuvième siècle !
Je n’aurai par contre croisé personne de la journée (certes classée « rouge » sous un mistral faible à modéré), et la Provence verte était alors sûrement beaucoup plus peuplée, avant de se transformer en une Provence urbaine et balnéaire… Quoi qu’il en soit, encore un beau circuit à vélo dans le Siou Blanc qui n’en manque pas, avec des monotraces roulants et peu caillouteux dans l’Ubac de Valbelle et sur le chemin de la Sauvelle ; il faudra revenir en spéléologie pour découvrir des cavités techniques mieux préservées !
le tracé du jour
la rivière Gapeau au départ, et une pause gourmande
la retenue de l'Evoué et ses nénuphars
belle géologie sous le chaos dolomitique des Friginiaires et entre les Aiguilles de Valbelle et leurs arches
le long et beau monotrace dans l'Ubac de Valbelle
les tours de calcaire vers le Pas du Pilon
le monotrace de descente passant près de l'entrée de la Baume des Lumes
la Baume des Lumes, ses concrétions noires et ses inscriptions multiséculaires d'une époque où la Provence verte était plus parcourue (strictement personne croisé de la journée)
Découverte en mode spéléologie des grottes Loubière (officiellement interdites d’accès depuis leur fermeture en 1989, mais on peut forcer l’entrée moyennant quelques bouts de corde et/ou un peu de dextérité), situées juste au nord de Marseille 2 kilomètres au nord-ouest du village de Château Gombert. Il s’agit d’un complexe de grottes bien concrétionnées, avec notamment de grandes salles reliées par des corridors étroits, malheureusement très dégradées par leur fréquentation passée, aménagement touristique ou même transformation en discothèque ([sic]). On trouve d’ailleurs encore de nombreuses traces de ces aménagements, passages taillés et escaliers creusés, mais aussi câbles électriques et ampoules laissé.es sur place…
Dommage pour la conservation des spéléothèmes et pour la richesse archéologique de cette cavité où de nombreux vestiges préhistoriques avaient été découverts avant sa marchandisation.
l'entrée murée et ses ronces à mûres
l'entrée étroite, ficelle de 3 mètres utile pour descendre le sac et habitude des mouvements type réta pour remonter
les grandes salles, leurs spéléothèmes bien dégradés (casse et noircissement), l'aménagement encore bien présent
détails de plafonds concrétionnés
détails de micro-gours
les choux-fleurs d'orages dans le ciel comme la veille
En ce samedi de temps menaçant et au ciel brouillé par les particules sahariennes en suspension, découverte d’une cavité peu connue et donc encore bien préservée malgré son accès non technique, située sur le plan d’Aups près du Tumulus de Miette et de l’oratoire éponyme.
Un trou dans le sous-bois mène à un couloir raide et glissant puis à une galerie bien concrétionnée mais aussi très boueuse. Passées deux étroitures entre spéléothèmes, on gagne par contre une galerie horizontale d’une trentaine de mètres au riche concrétionnement actif et coloré, draperies, colonnes, excentriques aux couleurs et sons cristallins, sans doute une des plus belles grottes d’accès facile de la région (prévoir malgré tout un bout de corde d’une dizaine de mètres - à fixer autour d’un tronc près de l’entrée de la cavité - pour faciliter au retour la remontée de couloir d’entrée).
l'entrée de l'aven
les spéléothèmes après le couloir glissant d'entrée (corde utile pour la remontée, nombreux amarrages naturels bourgeonnants...)
la première châtière entre colonnes
la belle galerie finale
détail des concrétions
excentriques
choux fleurs
aragonite
stalactites et draperies, une belle cavité que cet aven du Rempart des Béguines
Bientôt dans Speleo Magazine (numéro 122 de juin 2023) un article de Philippe A. sur la grotte aux méduses « découverte » en 2018, et dont l’exploration s’est (vite !) achevée en mai 2023, une des plus belles grottes marines concrétionnées de la côte méditerranéenne française.
Retour vers la grotte « découverte » en 2018 au large de Callelongue, cette fois dotés de tout l’attirail pour en finir l’exploration dans les puits encore jamais descendus : cordes, baudrier, perforateur... Heureusement la voûte mouillante d’entrée permet le passage du paddle chargé de la vingtaine de kilos de cette quincaillerie spéléologique !
Comme craint, la galerie inférieure aperçue mais encore jamais parcourue se termine rapidement sur un colmatage d’argile, et n’offre pas la variété et la densité de spéléothèmes de la galerie supérieure.
Quoi qu’il en soit, c’est vraiment une belle cavité mêlant eaux fluorescentes dans la galerie d’accès et concrétionnement riche et diversifié au-dessus, sans équivalent à ma connaissance en Méditerranée française, article rédigé par Philippe A. à venir !
On se consolera au retour dans deux autres belles grottes marines moins confidentielles mais également bien esthétiques.
Retour dans la grotte du Draïoun pour la première fois depuis 2014 (pensée pour les disparus à qui j’avais fait découvrir cette grotte), ce réseau exceptionnel pour la beauté de son cadre (à flanc de falaises soubeyrannes au-dessus de la mer), son ampleur (des kilomètres encore en cours d’exploration, des méandres labyrinthiques, des puits, des étroitures, des galeries en corniches parfois exposées…) ainsi que la richesse de ses spéléothèmes (notamment les cristaux de quartz (?) et les excentriques tridimensionnelles).
Faute de matériel de remontée sur corde (1 poignée pour 2…) on se limitera à la visite de la petite salle au-dessus du puits de 20 mètres avec ses murs et son plancher de cristaux de quartz (?) blanc rosé , en s’aidant d’une statique posée sur un point très rouillé et une lunule sur colonne d’aragonite… On découvrira au retour la galerie supérieure accessible depuis le porche d’entrée, bien équipée de cordes fixes pour ses passages exposés et mieux préservée que la galerie inférieure souvent bien dégradée. A noter ce jour beaucoup d’essoufflement dans certaines portions de la grotte, sans doute actuellement riche en gaz carbonique !
l'accès par les vires et l'entrée de la grotte du Grand Draïoun
montée sur sangles et friends dans la niche aux cristaux de quartz (?), contre assuré à la poignée sur la statique
le superbe four à cristaux de quartz (?)
descente en rappel sur amarrage bien rouillé
retour au camp de base puis à l'entrée par la galerie inférieure
Balade encordée aux alentours de la calanque ciotadienne de Figuerolles pour y découvrir une grotte marine, bien connue de certains locaux comme en témoignent les vieux scellements qui permettent de protéger son accès (facile mais un peu impressionnant), encore peu ébruitée ailleurs. Ce lac souterrain - relié à la mer par une faille longue de plusieurs dizaines de mètres mais large de quelques dizaines de centimètres - s’avère superbe, surtout juste après l’équinoxe où le soleil vient aligner ses rayons avec la faille d’ouverture et donc diffuser son faisceau de lumière jusque dans la grotte marine. Celle-ci baigne dans une ambiance presque surnaturelle avec ce tube de lumière blanche qui tombe littéralement des cieux, ce qui éloigne encore plus cette cavité d’un « Trou du Diable » (auquel certains la rattachent) à laquelle elle n’est pas reliée, sauf peut-être par un siphon ; l'appeler "grotte de Gaméou" fait beaucoup plus sens !
On se remettra de cette expérience mystique sur les couennes de Figuerolles, toujours aussi faciles et panoramiques !
le Bec de l'Aigle et ses figuiers de Barbarie en fruits
Découverte d’une grotte située versant sud de la Sainte-Baume entre Cuges-les-Pins et Signes, connue pour avoir été le lieu de tournage du film « Manon des sources » - dans la version de Claude Berri en 1986 – pour la scène du lac souterrain. On peut y admirer, non pas Emmanuelle Béart en tenue d'Eve prenant son bain (ah les émois d’adolescent !), mais un des plus beaux concrétionnements de la région, pour une approche « facile » (quelques dizaines de mètres de désescalade à travers châtières et boyaux, le tout sur un sol parfois un peu boueux) et qui ne demande en tout cas pas la corde. La dernière salle offre en effet un volume inhabituel, une cathédrale de calcite sur un côté avec une immense coulée de méduses sur une quarantaine de mètres de haut, face à des colonnes et une chandelle suspendue exceptionnelle, un vrai lustre de pierre à allumer à la frontale !
Au-delà de son intérêt patrimonial, cette grotte du Vieux Mounoï propose donc pour la région un des meilleurs ratios intérêt spélestéthique/temps d’approche et de parcours (30 minutes de marche + 30 minutes de progression spéléo dans des boyaux et chaos de blocs), le plus difficile étant comme souvent de trouver au départ LA galerie qui ne soit pas une impasse mais mène bien au Graal de la salle finale !
la grotte, ses lierres et ses trous au plafond
dans la première grande salle (cul-de-sac)
dans l'avant-dernière salle, draperies et fistuleuses
dans la salle du bas 50 mètres sous la surface, superbes méduses en mur de 40 mètres et en chandelle