14 mars 2025 5 14 /03 /mars /2025 19:16

Un article sur les raids à skis autour des lacs de Rabuons et de Vens en Haute-Tinée, dans le numéro 60 de Ski Rando Magazine :

https://www.skirandomag.com/numero60/

 

croisière dorée dans le Mercantour, l'article
14 mars 2025 5 14 /03 /mars /2025 19:13

Ci-dessous le texte de l'article paru dans le numéro 59 de Ski Rando Magazine, sans les topos :

https://www.skirandomag.com/numero59/

Beaucoup ne connaissent du sport que les manifestations, compétitions, fédération, émulation, ostentation, fanions, chronomètration et dossardisation. A l’école, à la télévision, à la radio, dans la presse, au café du commerce, à la machine à café, il n’y a de place que pour ce sport institutionnalisé, marketé, une déclinaison transpirante du capitalisme et de la course autant contre les autres que pour soi. La montagne, tant hivernale qu’estivale, semble alors se transformer en un gigantesque terrain de sports plus ou moins aseptisé où cet hubris vient s’exprimer. Il est pourtant des sports, plus ludiques qu’olympiques, où la recherche de la beauté prime sur la course à la performance, et où l’activité physique constitue plus un moyen qu’une fin. Comment mieux définir le ski de randonnée, littéralement la pratique de la balade (avec 2 planches aux pieds) sur neige, une activité qui consiste plus à parcourir un milieu exigeant mais éminemment esthétique qu’à lutter contre le chronomètre ? La montagne enneigée n’est alors plus un stade où l’on vient explorer les limites de son corps, mais un lieu d’exploration et la destination par elle-même où notre corps va nous emmener.
Dur à faire aval(is)er cette conception à votre beau-frère, pour qui sport signifie forcément compétition : vous n’avez pas de Rolex au poignet à 50 ans, pas de Mercedes au garage, pas de Berluti aux pieds, et pas même un classement dans la dernière course de ski, un loser archétypique décidément ! Votre beauf n’oubliera d’ailleurs de mentionner que s’il ne risque qu’une contredanse pour ne pas avoir respecté les itinéraires imposés en voiture, vous risquez votre peau pour persister à divaguer à votre rythme loin des pylônes des stations ou des fanions des courses, à la merci des plaques à vent traîtreusement cachées. Et oui, vous n’avez d’autre objectif que de faire de belles courses sans faire la course, vous immerger dans la nature hivernale, sans les oripeaux de l’anthropisation, dans la solitude, le calme et le silence de la montagne enneigée, là où votre regard d’homo sapiens attiré par le mouvement peut enfin cesser de papillonner pour mieux se fondre dans Pachamama.
Dans ce cas, pourquoi ne pas viser les alentours du lac de Serre-Ponçon, son soleil du Sud et sa ceinture de sommets qui dominent le bras nord-est de ce grand lac de basse altitude, dont la topographie échancrée peut faire penser à un fjord norvégien ? 

Ce lac de barrage mis en eau en 1959 a noyé entre autres le village de Savines (reconstruit à l’identique à côté)… mais pas les sommets qui permettent de skier vue mer lac. C’est une mégabassine ou plutôt gigabassine (naturelle et non pas excavée) qui assure l’approvisionnement en eau du pays aval en saison sèche estivale - en tout cas tant que les glaciers des Ecrins existent et assurent un débit en l’absence d’épisode pluvieux – et le lissage des crues, comme récemment en mai 2018, décembre 2019 ou mars 2024. Ne voyez pas la main des lobbys productivistes agricoles derrière ma plume ou plutôt mon clavier, et inutile de venir installer votre tente 2 secondes dans le platane de mon jardin, cette analogie oiseuse a juste pour but de rappeler tout l’intérêt de ces lacs de retenue pour des régions au climat semi-aride telles que la Provence. 

En complément de ses fonctions hydrologiques et énergétiques, le lac constitue également l’un des épicentres du tourisme estival dans les Alpes du sud, avec sa petite mer intérieure tournée vers les montagnes, bordée de plages et parcourue d’une armada de voiliers, dériveurs, wing truc et foil machin, du tourisme balnéaire qui vient fort opportunément suppléer au vecteur touristique du ski hors saison des sports d’hiver. Son remplissage estival, au plus près possible de sa cote d’exploitation optimale, devient d’ailleurs un marronnier chaque printemps.

C’est dans cette zone que le ski de randonnée prit son essor en France, plus précisément sur les pentes du Mont Guillaume, où le lieutenant Widman a voulu prouver à la fin du dix-neuvième-siècle la supériorité du ski sur la raquette pour les déplacements des troupes de montagne. Sa démonstration s’est basée sur un test, lui-même constituant le cobaye, et il effectuera son aller-retour de la gare d’Embrun au sommet du Mont Guillaume en 5 heures de montée puis 1h30 de descente avec des skis commandés de Suède. Cette première descente du 12 février 1897, déjà conforme à l’esprit des déplacements bas carbone par la force des choses (!), marquera comme il l’espérait le début de l’introduction des skis dans l’arsenal des troupes de montagne françaises. Si vous voulez aujourd’hui gagner le sommet du Mont Guillaume et sa chapelle, en hommage ou non à l’importateur du ski de randonnée en France, vous pouvez utiliser votre arsenal modernisé, avec des skis en bois ou non, suédois ou pas, mais ne manquez pas d’invoquer l’argument du réchauffement climatique en près de 130 ans pour justifier votre départ d’une altitude supérieure à celle de la gare d’Embrun à 870 mètres !

Difficile de retenir une unité géographique ou administrative pour les itinéraires décrits dans cet article, à cheval entre Alpes Hautes ou de Haute-Provence, Ubaye et Ecrins, massifs et départements, le seul critère retenu étant donc… la vue sur le lac depuis les sommets !
Les courses seront décrites par leur position géographique autour du lac, dans le sens des aiguilles d’une montre, du Piolit au Pouzenc en passant par le Mont Guillaume ou le Petit Parpaillon, autant de pentes dans lesquelles vos spatules pointeront vers le Grand Bleu… ou plutôt Petit Bleu si l’on veut plus d’objectivité.

Dans un Champsaur déjà bien connu des skieurs de randonnée, le Piolit constitue peut-être la course la plus classique : la proximité de Gap, une orientation nord favorable dans les Alpes du soleil, une longueur et difficulté rendant la course accessible au plus grand nombre, un terrain varié de la piste de ski nordique aux combes sommitales en passant par la forêt, font que la voie normale en face nord au départ de la station d’Ancelle voit des processions de skieurs les week-ends de beau temps.
Il est pourtant un autre chemin, guère plus difficile ou long - mais certes plus vite déneigé sous l’anticyclone : celui de la face sud-est au-dessus de Chorges, où l’expérience intime se rapprochera plus de la retraite que du pèlerinage. Ici en adret - comme en ubac dans la voie normale - vous trouverez pistes, mélézins et grandes pentes sommitales, mais ici comme pas ailleurs vous évoluerez avec le lac dans le rétroviseur à la montée et le masque à la descente, sur un versant tourné tout exprès vers le fjord. C’est une course panoramique s’il en est, où vous risquerez autant la fracture de rétine que l’entorse du genou !

C’est au-dessus de Réallon - l’autre station de ski alpin à taille humaine de cette extrémité méridionale du Champsaur – que se trouvent les Aiguilles de Chabrières, un flambeau de calcaire perché à moins d’une dizaine de kilomètres à vol de chocard du lac. Ces grandes tours de calcaire accolées détonnent dans le doux relief du Champsaur, et leur silhouette dolomitique attirera tant les grimpeurs – vite échaudés par un rocher de qualité… perfectible - que les skieurs, dont le regard se portera sur les couloirs blottis entre les aiguilles, notamment le couloir nord-est ou celui de la brèche est. Mon premier permet de gagner la crête sommitale et son formidable belvédère sur le lac ; mon second donne accès au grand karst de l’Oucane, un lapiaz - rare dans les Alpes du Sud – qui pour les nordistes ne manquera pas d’évoquer le désert de Platé dans le Haut-Giffre.

Mais l’aiguille du sens horaire tourne, et il est maintenant l’heure de se pencher vers le berceau du ski de randonnée en France comme abordé en préambule : le Mont Saint-Guillaume, dont la première ascension à skis remonte donc au dix-neuvième siècle. Je décrirai ici l’itinéraire classique et historique, celui qui bénéficie du meilleur enneigement et de l’approche routière la plus commode : le versant nord-est au départ du Château de Caléyère puis par la chapelle des Séyères. Le passé n’est pas que militaire ici mais aussi religieux, et vous pourrez vous recueillir tout au long du chemin de croix de la montée dans ce lieu historique du ski de randonnée en France, d’abord à la chapelle des Séyères à demi-pénitence, puis à la chapelle sommitale et son point de vue mystique sur le lac qui s’étire vers l’ouest.
Si vous considérez ne pas avoir suffisamment flagellé vos mollets en regard des nombreux vices à expier, vous pourrez même aller rôtir dans le couloir sud de l’Arpion, une belle ligne peu connue à l’ambiance rocheuse marquée entre des falaises de calcaire déliquescent.

Place au sécularisme maintenant, vers le sommet du Parpaillon, où remontées mécaniques et tunnel traversant la montagne ramènent à une montagne où l’économie et le matérialisme priment sur la spiritualité. Ici comme pour les Aiguilles de Chabrières, l’approche pourra se faire à la force des mollets depuis le parking, ou à celle du portefeuille depuis le sommet des pistes de Crévoux. Petite préférence me concernant pour l’utilisation (sacrilège !) des téléskis, pas seulement par paresse et velléité d’échapper à la longue piste du Parpaillon, mais aussi par épicurisme et souhait de passer par l’esthétique crête nord du col de Girabeau. Vous profiterez dans les deux cas d’une grande descente versant nord du Petit Parpaillon : ce sera aussi bon en poudreuse que de manger du Nutella à la cuillère dans le pot… mais sans les remords !

Quelques heures de cadran plus tard, nous voilà maintenant sur le Pouzenc, la montagne-phare de l’Embrunais, dont la face nord aimante le regard des skieurs de retour des Ecrins ou du Queyras sur la nationale 94. Cette pyramide rocheuse à la position dominante peut s’atteindre par presque tous ses versants, le plus commodément sans doute par son versant sud puis son court mais raide et exposé couloir nord-est qui force la barre sommitale.  L’arête sommitale vous récompensera au-delà de toute attente, et l’endorphine supplantera vite l’acide lactique sur cette ligne alpine et suspendue entre neige et ciel, tendue vers le lac de Serre-Ponçon très loin sous les spatules. 

Voilà, l’aiguille a terminé sa révolution, et il est temps que ces verbiages se terminent enfin pour laisser la place à ce que vous avez toujours voulu savoir sans jamais oser le demander : les topos détaillés de ces courses aux allures norvégiennes, mais à moindre bilan carbone et meilleur bilan soleil ! 

31 janvier 2025 5 31 /01 /janvier /2025 17:54

Ci-dessous le texte de l'article paru dans le numéro 57 d'octobre 2024 de Ski Rando Magazine sur le ski de rando autour du Col de l'Izoard :

Vous cherchez désespérément les meilleures conditions de ski pour vos deux jours de liberté hebdomadaire ? La pluie s’est invitée jusqu’à 2200 mètres et le manteau neigeux – plus un maillot de corps qu’un pullover - commence à plus de 1800 mètres. La combe sud est interdite d’accès pour nidification du dahut, la combe nord a été déclarée zone de protection du condor ; avec la fonte du pergélisol le Rocher du Mikado commence à s’effondrer sur son couloir est, alors que les éleveurs d’alpagas en colère bloquent l’unique route d’accès au point de départ de la croupe ouest de Millevaches. Vous avez bien songé à la station élevée de Super Chamois-les-Alpes comme point de départ, mais la perspective de partir de l’usine à ski en barres de studios all inclusive a vite douché vos velléités.
L’équation paraît insoluble, mais ne vous torturez plus les méninges dans cette gymnastique intellectuelle rendue de plus en plus difficile par le réchauffement climatique, ne risquez plus un claquage de neurones avant la déchirure musculaire : visez l’ouest-Queyras autour du mythique col de l’Izoard ! Des combes et couloirs facilement accessibles depuis des points de départ à près de 2000 mètres, encore (partiellement) préservés des affres du réchauffement climatique, pas d’urbanisation façon Sarcelles-sur-Neige, et des altitudes suffisamment élevées pour éviter les redoux noirs et faire des globules rouges, sur du blanc garanti sans taches de vert ou de marron de décembre à début avril. 
L’ouest-Queyras s’enneige un peu par tous les flux, généreusement par ceux de sud/sud-ouest, moins par flux de nord-ouest avec la barrière des Ecrins, et très variablement par retour d’est suivant sa profondeur de pénétration depuis la frontière italienne à l’est, mais cette ouverture aux  influences climatiques tant méditerranéennes qu’atlantiques garantit généralement un enneigement correct quelles que soient la direction des vents dominants et l’origine des perturbations qu’ils apportent. Ici point d’enneigement famélique comme cela peut être le cas dans l’est-Queyras en l’absence de retour d’est, et rarement de neige ravagée par les redoux pluvieux comme cela est de plus en plus souvent le cas même en plein hiver dans les massifs préalpins à l’ouest. Vous ne serez pas à l’ouest en choisissant l’ouest-Queyras comme prochaine destination de ski de rando !

Même avec un ISO à haute altitude, on y profite du ski à la norme ISO 4807 : on part ici de villages pittoresques faits de maisons anciennes en bois et lauzes et d’églises classées, au-dessus mélézin et alpages façon carte postale, le tout sous un ciel bleu 400 jours par an comme le clament les brochures de l’office du tourisme. 

Dans l’imaginaire du montagnard, le Queyras est fait de sommets arrondis, dont les alpages accueillent vaches l’été et skieurs de randonnée l’hiver, les uns goûtant sa poudreuse, les autres broutant son herbe. Et pourtant ici, la carte ne montre que Pics, Ravins et Casses, bien loin des Monts escomptés, et de fait sur le terrain les sommets altiers ceinturés de falaises et les crêtes dentelées confirment une topographie bien alpine. Un terrain varié donc, de la balade du dimanche avec votre belle-mère à la course entre allumettes-collants-pipettes (du bas en haut), de la peau de phoque pour tous les goûts et les niveaux, skieurs de randonnée ou skieurs-alpinistes, skieurs de 5.x et skieurs de 2.y, pour des dénivelées plébéiennes ou élitistes. Comme la toponymie l’évoque, on évolue dans une grande diversité paysagère, des mélézins à écureuils aux alpages à vaches, des casses à marmottes aux falaises à aigles royaux, des pitons de cargneule aux crêtes calcaires, des longs vallons au pas alternatif aux couloirs à virages sautés, de quoi changer radicalement d’environnement en quelques fléchissements des genoux, la magie de l’étagement altitudinal. Et même si l’on sera rarement seul.e.s sur ces randonnées bien connues des locaux ou estrangers, leur fréquentation restera toujours incomparable à celles des classiques de Belledonne ou des Aravis : il n’est pas déraisonnable de croiser ici plus de quadrupèdes que de bipèdes !

Cet article va décrire une petite sélection de courses autour du Col de l’Izoard, autour de 3 points de départ différents. Versant sud, Arvieux et un peu en amont Brunissard, directement sous le col, et Souliers, dans la vallée située immédiatement à l’est, trois beaux villages authentiques en musée à ciel ouvert d’architecture queyrassine, ont été préservés par leur isolement au-dessus de la vallée du Guil longtemps enclavée, dont le seul accès en saison de ski passe par une route en corniche taillée dans la falaise rive gauche de la rivière. Versant nord, une route moins exposée amène depuis Briançon au hameau du Laus, lui aussi riche en chalets, cadrans solaires et fontaines. Les villages de Brunissard et du Laus ne sont distants que de 20 km par le col de l’Izoard - compter guère plus de 2 heures à skis – mais la fermeture de ce dernier en hiver impose le détour routier par la haute vallée de la Durance loin à l’ouest – compter 6 fois plus de kilomètres et presque autant de temps en voiture qu’à skis. Les nombreux hébergements disponibles au Laus (station de ski nordique) et à Brunissard et Arvieux (stations de ski nordique et alpin) autorisent toutefois de nombreuses combinaisons à skis entre ces deux points de départ éloignés sur 4 roues mais proches sur 2 peaux.

Au départ du Laus, les courses les plus courues ou à tout le moins skiées ont pour objectif la belle pyramide neigeuse de l’Arpelin et le col de Chaude Maison, dont une variante, à peine plus longue mais beaucoup moins fréquentée et plus esthétique, mérite une description dans cet article : c’est mieux de jouer au cabri du Queyras qu’au mouton de Panurge ! La pyramide de l’Arpelin s’atteint préférentiellement à la montée par la route du col de l’Izoard, qui devient une piste de ski de fond avec la neige, puis le bien mal-nommé Col Perdu - vite trouvé juste au-dessus du Refuge Napoléon - donne accès à la jolie arête sud de l’Arpelin. La descente se fera plutôt sur le versant est plus skiant : soit sous le sommet versant nord puis est, soit directement dans le versant est si la nivologie l’autorise, soit par des pentes moins raides sous le Col Perdu. La suite se passera dans tous les cas dans le Bois des Oules puis sur la piste de ski de fond, juste assez inclinée pour qu’elle reste plaisante à skier.

Les autres classiques se trouvent en face versant ouest : le col de Chaude Maison peut être rejoint par ce même itinéraire de ski nordique, qu’on quitte à gauche vers 2000 m pour le versant ouest de Turge de la Suffie. Une fois le col atteint, je conseillerais de prendre son courage à 2 gants et de poursuivre par la crête vers le sud : vos cuisses pourront toujours maudire l’auteur de cet article, mais la beauté et la sauvagerie de la descente par la Combe Obscure valent bien cette trentaine de mètres de dénivelée supplémentaire. Vous me bénirez peut-être entre les pénitents de cargneule en y traçant la poudreuse soyeuse dans les lumières douces d’une fin d’après-midi hivernale, plutôt que de skier en trafolée - en serrant les dents mais pas les skis - par la voie de montée au col de Chaude Maison.

Le sommet emblématique du coing – la pyramide rocheuse du Pic de Rochebrune, au profil aisément reconnaissable depuis une bonne partie des Alpes du Sud – dresse ses 3320 mètres loin au-dessus de tous ses voisins. Il peut s’atteindre à skis au départ du Laus par un itinéraire ni trop long ni trop raide, mais invisible du bas dans sa partie finale : un court couloir ouest, pas toujours suffisamment enneigé, qui mène à une brèche. De cette brèche une dernière pente exposée permet de gagner le sommet nord, le plus élevé de la pyramide ; en neige dure, où une chute pourrait avoir des conséquences bénéfiques pour les comptes de votre caisse de retraite, je recommanderais d’ailleurs l’emploi de crampons plus que de skis. C’est la voie normale de ce culmen du Briançonnais, autant à pieds qu’à skis, mais vu la qualité ou plutôt non-qualité du rocher local, rappelée périodiquement par de gros éboulements, il est normal de planifier la virée en hiver ou au printemps dans la poudreuse ou sur la moquette, et anormal de le faire en saison chaude dans les éboulis et casses où flotte une odeur de poudre. La fréquentation de cet itinéraire varié et esthétique, qui constitue désormais à skis le seul accès sûr à ce sommet majeur du Briançonnais, dont le couloir sommital blotti entre les falaises stratifiées offre une superbe ambiance dolomitique, n’est pas en rapport avec sa classe, tant mieux pour les skieur.s.e.s (?) qui choisiront de s’y lancer !

Un autre itinéraire recommandable au départ du Laus, rapide d’accès, court et peu fréquenté dans sa partie finale : le Petit Peygu par son couloir sud-est, une pente raide cachée sur l’adret qui succède à une approche en mélézin bien skiable, un condensé de Queyras juste au-dessus du parking, pour les feignant.e.s et/ou pressé.e.s.

De l’autre côté du col, on trouvera également des classiques souvent tracées au départ d’Arvieux et Brunissard, par exemple dans le vallon de Clapeyto. C’est une immense combe à vocation pastorale, ponctuée de nombreux chalets d’alpage dans sa partie basse, mais aussi un vallon suspendu protégé par un verrou rocheux se contournant par des pentes sud raides. Je recommande de viser les cols et sommets les plus orientaux afin de réduire les parties de ski de fond inhérentes à ces vallons peu inclinés, par exemple vers les Pics du Cros ou de la Rousse où l’on peut imaginer de belles combinaisons à la découverte entre autres de la combe sud du Col de la Rousse et ses superbes aiguilles de calcaire.

En parlant de flèches de caillou, je ne peux que recommander d’aller explorer la Casse Déserte et ses aiguilles de cargneule aussi esthétiques que ludiques, topo déjà paru dans le numéro 43 de SkiRando Magazine. L’hiver est la meilleure saison pour excursionner dans ce décor presque fantasmagorique de falaises compactes de cargneule jaunâtre et d’aiguilles de conglomérat dressées telles des pénitents, dont le gel atténue pour quelques mois la fragilité. Cerise sur le gâteau glacé, des couloirs dessinés pour le ski, invisibles du bas, s’insinuent entre ces aiguilles, en sortant sur d’étroites crêtes neigeuses, au milieu des forêts d’aiguilles coiffées de chapeaux de neige. On pense à du land art revisité par Gaudi, une Sagrada Familia de l’ouest-Queyras, une armée de pénitents gelés pour les hauts-alpins, ou à des hoodoos made in France pour les amateurs de l’Ouest américain. Ces couloirs jamais très raides peuvent s’enchaîner à loisir tant que la montre et les jambes le permettent, et il vous sera aussi difficile de vous résoudre à la dernière descente que de renoncer à votre doudou quelques décennies plus tôt.

Dernière vallée à explorer, celle de Souliers, hameau dépourvu de station de ski alpin ou de pistes de ski nordique, et donc encore plus authentique que les autres villages sus-nommés, et le meilleur point de départ pour la crête dentelée des Pics de Côte Belle, leurs vastes pentes à carving et leurs petits couloirs à sauting ([sic]), un magnifique terrain de jeux alpin sur et à travers la dolomie locale !

Même si cet article a vocation à vous suggérer certains itinéraires testés et approuvés par l’auteur, je vous invite également à explorer les cartes pour imaginer vos futures courses, indépendamment des topos papier ou digitaux accessibles par un simple coup d’oeil ou clic. Dessiner mentalement un itinéraire à skis sur une carte et imaginer un cheminement entre les courbes de niveaux sont des préliminaires importants pour votre rapport personnalisé avec la montagne… Concevoir votre propre course plutôt que suivre un topo est comme cuisiner suivant votre inspiration et vos préférences culinaires, plus exigeant mais aussi gratifiant que de choisir un plat prédéfini sur la carte d’un restaurant !
 

31 janvier 2025 5 31 /01 /janvier /2025 17:48

Dans le numéro 59 de Ski Rando Magazine de février 2025, une sélection d'itinéraires autour du lac de Serre-Ponçon, dissemblables mais offrant tous une vue fjord depuis leur sommet.

https://www.skirandomag.com/numero59/

Beaucoup ne connaissent du sport que les manifestations, compétitions, fédération, émulation, ostentation, fanions, chronos et dossards. A l’école, à la télévision, à la radio, dans la presse, au café du commerce, à la machine à café, il n’y a de place que pour ce sport institutionnalisé, marketé, une déclinaison transpirante du capitalisme et de la course autant contre les autres que pour soi. La montagne, tant hivernale qu’estivale, semble alors se transformer en un gigantesque terrain de sports plus ou moins aseptisé où cet hubris vient s’exprimer. Il est pourtant des sports, plus ludiques qu’olympiques, où la recherche de la beauté prime sur la course à la performance, et où l’activité physique constitue plus un moyen qu’une fin. Comment mieux définir le ski de randonnée, littéralement la pratique de la balade (avec 2 planches aux pieds) sur neige, une activité qui consiste plus à parcourir un milieu exigeant mais éminemment esthétique qu’à lutter contre le chronomètre ? La montagne enneigée n’est alors plus un stade où l’on vient explorer les limites de son corps, mais un lieu d’exploration et la destination par elle-même où notre corps va nous emmener.
Dur à faire aval(is)er cette conception à votre beau-frère, pour qui sport signifie forcément compétition : vous n’avez pas de Rolex au poignet à 50 ans, pas de Mercedes au garage, pas de Berluti aux pieds, et pas même un classement dans la dernière course de ski, un loser archétypique décidément ! 

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25 septembre 2024 3 25 /09 /septembre /2024 13:38

Parution dans le numéro 57 (octobre – novembre 2024) de Ski Rando Magazine de mon article sur le ski autour du col de l’Izoard, mythique pour les cyclistes, mais à ne pas négliger non plus par les skieurs de randonnée !

https://www.skirandomag.com/

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Izoard, dans les traces des casses du Queyras, l'article
26 novembre 2023 7 26 /11 /novembre /2023 20:41

Ci-dessous le texte - sans les topos - de l'article paru en septembre 2023 sur le ski de rando autour de Pralognan-la-Vanoise :

https://www.skirandomag.com/numero53

Tu es un.e junkie du ski mécanisé ? Un.e boulimique des télé-bidules qui te propulsent en quelques minutes en haut de la piste rouge des chamois de Super-Truc-les-Alpes pour la descendre à la chaîne ? Avec la fermeture des stations de ski, hauts lieux de transmission du covid dans leurs espaces plus fermés et bondés que les grandes surfaces, le funeste mois de mars 2020 t’a brutalement sevré. Tu cherches un moyen de ne pas reproduire ta crise de manque, si jamais les agents pathogènes venaient encore infester les barres de télésiège et perches de téléskis ?
Il est du ski envisageable sans pylône, le ski dit de randonnée, le meilleur traitement de substitution pour traiter ton addiction ! Par contre je ne vais pas te jeter directement en pâture aux ours blancs, panthères des neiges et autres gendarmes qui verbalisent à plus d’un kilomètre du domicile, mais te proposer plutôt un sevrage en douceur à… Pralognan-en-Vanoise, une station qui t’offrira encore une poignée de remontées mécaniques et des restes de civilisation : restaurants, bars… mais sans l’option dance floor à ciel ouvert sur plancher chauffant. Car au-delà des domaines skiables tentaculaires, Espace Killy et autres Paradiski qui ont fait fleurir les télésièges sur bon nombre d’alpages de Haute-Tarentaise, on trouve encore ici, dans cette frange ouest du parc national de la Vanoise, plus d’épicéas que de pylônes. Tu pourras commencer ta cure de désintoxication par le petit bip rassérénant du forfait en bas de la remontée, avant de coller tes scalps de pinnipède sous les skis pour partir dans la terra incognita hivernale, son silence pesant et sa solitude. 

Trêve d’œcuménisme, Pralognan est situé au cœur de la Vanoise, au bout de la vallée des Doron, contre le versant ouest des Dômes de la Vanoise - dotés de ce qui reste toujours le plus gros appareil glaciaire du massif éponyme – et de la Grande Casse, point culminant du massif. Lorsqu’on pense Vanoise, on imagine des marmottes qui s’ébrouent sur une prairie du Parc National ou des skieurs qui s’ébattent sur une piste d’une station de Tarentaise, et Pralognan – Pralo pour les initié.e.s – réalise la synthèse de ces deux images mentales dissemblables, façon « en même temps » macronien.
Qu’on en juge : près géographiquement mais loin paysagèrement des usines à ski voisines et de leur urbanisme façon Sarcelles-sur-Neige, on y trouve encore un village à taille humaine sans barres de studios all inclusive, volontairement plus tourné vers les sports doux – randonnée à pieds ou à skis – que vers le ski mécanisé. C’est donc un petit Chamonix made in Vanoise (sans la foule cosmopolite ou les pizzas à 30 euros) où l’on cultive plus un entre-soi montagnard que le m’as-tu vu censitaire de Courchevel ou le tourisme hivernal de masse. 
Deux versants dissemblables se font face : un versant est vierge de remontée et plus généralement d’aménagement, un versant ouest équipé de télésièges sur sa partie basse, en forêt principalement, sans que cela nuise à la wilderness du haut de ce versant. Ils offrent tout l’éventail de paysages et de terrains de ski de la montagne à ses différents étages : forêt, alpages et glaciers sur le roof top, ce dernier étage comprenant d’ailleurs des glaciers suspendus, de calottes, de cirque, de cône d’avalanche (rares)… une anthologie des glaciers alpins qui n’attend que vos skis avant de fondre complètement.
Un terrain varié donc, doté d’une grande variété d’exposition et de difficulté, de la balade du dimanche avec votre belle-mère à la course entre allumettes-collants-pipettes (du bas en haut), les remontées mécaniques qui vous propulsent à 2000 m sans la moindre crampe ou goutte de sueur permettant d’ailleurs d’accéder aux plus hauts sommets dans la journée avec une dénivelée plébéienne.

On a pu découvrir ce beau terrain de jeux en ce début de printemps 2023, lorsqu’après des semaines de sécheresse la montagne a enfin repris un aspect plus hivernal. Après une montée progressive en latitude depuis le Sud, et des escales en Ubaye, Piémont et Maurienne, nous arrivons plein de mélanine et d’acide lactique un mardi soir un peu glauque sur Pralognan, sous un plafond de brouillard qui ne laisse pas repérer la suite du programme de cette semaine de ski de rando.

Le mercredi matin, le soleil a retrouvé le chemin du ciel, et la montagne scintille avec son revêtement refait à neuf, de quoi nous faire frétiller les spatules sur le télésiège qui nous emmène comme beaucoup d’autres à l’altitude 2000 m. En cette première journée on a prévu de monter sur la calotte glaciaire des Dômes de la Vanoise puis de revenir par les cirques ouest, un programme de grande ampleur qui justifie une entorse à l’éthique du montagnard avec l’usage des remontées mécaniques. La station de Pralognan a d’ailleurs cette particularité qu’on y croise à certains horaires plus de randonneurs à skis que de skieurs de piste, le sac à dos permettant de ségréger les deux catégories ; nombreux sont celles et ceux qui font preuve comme nous de pragmatisme dans leur usage des télésièges en regard de celui de leurs peaux autocollantes…
Quoi qu’il en soit, les températures froides du jour (avec un isotherme 0 coincé tout en bas dans la vallée) rendent inconfortables la moindre pause, et c’est donc encore frais mais bien refroidis par les -15°C ambiants que nous rejoignons le plateau glaciaire de la Réchasse. Tu parles d’un réchauffement climatique, encore un complot des chinois et des fabricants de voitures électriques !
Les Dômes de la Vanoise s’apparentent plutôt ici à un immense plateau suspendu où le glacier a gommé la moindre aspérité et le moindre escarpement, un inlandsis made in Vanoise - d’ailleurs le seul des Alpes françaises. Les températures polaires des lieux s’accordent bien avec ces paysages, mais nos thermorécepteurs n’ont que faire de ce que nos mollets, cœurs et yeux réclament, et nous poursuivons, sans nous arrêter mais en frissonnant, vers le Dôme des Sonnailles, malgré les premiers cumulus qui commencent à se multiplier vers l’ouest. Une petite heure plus tard, les gentils nuages décoratifs se sont transformés en un tsunami de volutes grises qui nous engloutit au sommet, juste avant d’aborder la descente complexe de son versant ouest coupé de barres rocheuses... Plus de détour par les cirques ouest au programme mais plutôt une descente directe vers la vallée dans le jour blanc, heureusement des traces récentes feront office de fil d’Ariane, et Iphigénie de viatique. On parviendra sans encombre à rejoindre le Doron de Pralognan, bien entamés par une descente gâchée par le brouillard en haut et la croûte non portante en bas, des aléas de ne pas adapter les plans de course à l’évolution des conditions météorologiques. Quoi qu’il en soit, un grand bol d’air froid mais pur, avant de retrouver dans le chalet de location l’odeur de reblochon oublié au soleil des chaussons de ski…

Après la descente de la veille dans les nuages, on tire les leçons du but météo et vise ce jeudi une course moins longue au-dessus du lac de la Patinoire, vu l’instabilité convective encore prévue dans l’après-midi. Le cirque du glacier éponyme offre tout un éventail d’orientations, du sud-ouest à l’est, de quoi optimiser sur place le choix de la course en fonction du niveau de cuisson de la neige, de « sortant du congélateur» à « bien trop cuite » ! 
Arrivés au lac de la Patinoire et son beau mur de glace stratifiée au niveau du front aval (un glacier de cône d’avalanches rare dans les Alpes !), on constate que la neige a été oubliée dans le four (solaire) en adrets - ou que les « grasses matinées » se paient en neige « grasse » au printemps - et prend donc le cap du versant est de la Pointe du Creux Noir. Cette pente est tourne progressivement nord-est, si bien que la neige lourde du bas se transforme en une belle poudreuse légère. On s’en réjouit et rêve déjà de gerbes de neige qui passeront dans la postérité photographique, sans remarquer que le vent a travaillé le manteau, doté de plus de cohésion et parfois croûté en surface.  Alors que je m’applique à zébrer de conversions la base du couloir nord conduisant au sommet, c’est la montagne qui me rappellera mon manque de vigilance lorsque je verrai la pente devant moi se fissurer et me sentirai glisser avec la plaque qui vient de céder sous mes skis… L’adrénaline sera comme souvent ma meilleure conseillère, et sans que j’aie le temps de réagir, mes jambes décident de filer en traversée vers le bas, tout schuss sur mes peaux et les talons libres… Un style disgracieux en télémark sur skis qui collent, et qui se conclut d’ailleurs par une chute tête la première dans la neige dès qu’un petit regard en arrière me prouve que j’ai pu échapper à la coulée. En cohérence avec le risque 2 du bulletin d’estimation des risques d’avalanches, la plaque de dimension modeste (entre 10 et 20 cm à la rupture, une vingtaine de mètres de largeur et cinquantaine de longueur) n’a conduit qu’à un petit dépôt épais de moins d’un mètre, sans doute pas suffisant pour ensevelir un skieur, mais une petite piqure de rappel sur le bras qui vaut mieux qu'un impact de pointe de sonde sur la face !
Skieur échaudé craint la neige froide, et on se redirige donc vers le col du Vallonnet, dont la rive gauche raide et cornichée offre par contre l’immense avantage d’avoir déjà transformé en neige « chaude ». On murmurera tout de même quelques « pas bouger » à la vague figée de neige qui nous domine ; nos incantations nous permettront de rejoindre sans histoire et surtout sans avalanche le col.
La descente s’avèrera meilleure que la veille, meilleure par la visibilité mais aussi les conditions de neige, de la poudreuse parfois un peu croûtée, qui perdra d’abord en qualité sur l’adret du Glacier de la Patinoire, puis en quantité sous le Chalet des Gardes, dans une pente sud raide déjà déplumée par le vent et le soleil. On rejoint ensuite le (télésiège du) génépi et les bières de son bar de piste, à se demander si le nez couleur fraise des bois des randonneurs à skis vient de leurs coups de soleil ou de leurs coups à boire ([sic])…

Après une pause (télétravail !) imposée par une journée de neige et de brouillard, on retourne ce samedi dans notre dure routine quotidienne à base de télésièges, pas alternatif puis sinusoïdes à la périodicité qui constitue une signature en soi !  On vise cette fois une autre classique au départ de Pralognan, le col de la Glière par son glacier éponyme (ah le manque d’imagination des topographes !), avec des orientations sud mais une nouvelle couche de fraîche pas encore gâchée par un soleil d’avril. Comme deux jours plus tôt, la neige devient vite profonde et légère sur le glacier dès qu’on passe d’un versant sud à un versant ouest, au point que les relais de traçage se font de plus en plus fréquents… Le col de la Glière s’atteint skis sur les épaules par une vingtaine de mètres raides, les skis une fois remis dans leur position naturelle sous les pieds nous assurent une bonne portance dans cette poudreuse sans fond. Comme promis à la montée, le ski sera d’anthologie à la descente dans une neige vierge mis à part les zébrures de la trace de montée, épaisse et légère comme rarement. Les photos témoigneront a posteriori d’un enfoncement jusqu’à la taille, les bâtons et jambes complètement enfouis dans une matière blanche pulvérulente, sans qu’on ait ressenti cet enfoncement comme un frein à la descente. Parvenus au replat sous le glacier, au diable la paresse et la fatigue, on choisit de remonter au collu à l’ouest pour remplacer la descente d’un versant sud en neige déjà alourdie par le soleil d’avril par une autre pente ouest en neige d’hiver. Pari réussi, puisqu’on y profitera encore d’une neige de cinéma, par contre alourdie dès que la pente se tourne vers le sud – sans la moindre cohésion, tant mieux pour les risques d’avalanche et le plaisir du ski. Une journée d’avril qui fera oublier pas mal de journées de janvier…

Le beau temps persistant et annoncé plus stable, joint à la fréquentation d’un dimanche de Pâques, nous laisse espérer du renfort pour tracer la petite face nord de la Grande Casse et ses 600 mètres de pente entre 40 et 50°. Pas de messe de Pâques pour nous ce jour, mais pour clôturer ce séjour un pèlerinage vers la pente raide iconique de la Vanoise, la face nord de de son point culminant, le long de séracs pas encore trop rabougris par le réchauffement climatique.
L’ambiance haute montagne de cette course ne se limite d’ailleurs pas à la pente finale, mais prévaut dès que l’on atteint le glacier de la Grande Casse et son cirque presque fermé de grandes faces dont le col éponyme constitue la seule échappatoire. L’austérité de l’environnement s’accentue encore dès que l’on prend pieds... euh crampons ou skis sur la face nord et son immense et raide pan suspendu de neige et de glace, à l’ombre jusqu’à la mi-mars puis au soleil rasant plus tard en saison.
Le traçeur doit alors façonner le millier de marches de l’escalier qui sera emprunté par les poursuivants, une tâche qui peut s’avérer ingrate au point d’invoquer une crampe pour passer son tour de traçage. Quoi qu’il en soit, on découvrira ce jour à notre grande surprise une partie haute exposée au-dessus de barres rocheuses, ce qui n'apparaissait pas dans les topos de cette course pourtant classique.

C'est que le recul glaciaire a fait récemment apparaître des bandes de rochers en haut de la partie occidentale de la face nord de la Grande Casse – celle dite de la « petite face nord », une évolution récente sans doute amplifiée par l’été 2022 et son bilan de masse glaciaire négatif record à l’échelle de toutes les Alpes. Le glacier a tout simplement intégralement fondu en haut de la petite face nord, laissant la place aux rochers… Une évolution encore plus inquiétante sachant que ce recul n’est pas celui de la zone d’ablation à cause d’une accumulation moindre dans la zone éponyme, mais le recul de la partie la plus haute de la zone d’accumulation par elle-même, en versant froid et raide à plus de 3500 mètres, là où la fonte estivale excède donc de facto l’accumulation du reste de l’année depuis de longues années (alors que cette zone devrait servir de « réservoir » de neige et de glace pour la partie basse du glacier…)
Les photos prises depuis une cinquantaine d'années montrent le changement complet de physionomie de la face nord dans cet intervalle, le glacier s’étant aminci considérablement là où il n'a pas fondu, et ayant perdu tous ses séracs à l’exception du sommital (pour mémoire la face est haute de 700 à 800 m de dénivelée). La fonte semble d’ailleurs s’être singulièrement accélérée depuis 2017, les cinq dernières années ayant suffi à assécher complètement le haut de la petite face nord.
Insérer image 
Après les photos de face, les photos à la verticale disponibles sur le site www.geoportail.fr, qui confirment la fonte du glacier côté ouest (petite face nord) et la disparition du sérac du bas entre 1960 environ et 2022.
Reste à espérer que Ie gros sérac restant ne s'effondre pas tout d'un bloc, à l'instar de celui de la Marmolada dans les Dolomites italiennes durant l'été 2022.
Si par endroits le recul glaciaire rend possibles des descentes à skis qui ne l’étaient pas avant (glacier des Bœufs Rouges, glacier du Casset), il peut ailleurs, comme ici par exemple, les rendre plus difficiles voire impossibles… Dans le cas de la petite face nord de la Grande Casse, la barre exposée de début avril 2023 semblait être recouverte plus tard dans ce printemps humide. C’est donc une descente à prévoir plutôt par des conditions de fort enneigement si l’on ne veut pas s’exposer plus qu’agréé a priori avec sa conscience et son trouillomètre ; il semble sinon opportun de viser la face nord centrale quelques centaines de mètres plus à l’est, à peine plus raide sur le haut mais moins exposée, en tout cas tant que la configuration du sérac sommital le permet…
Quoi qu’il en soit, la descente en poudreuse, déjà parfois légèrement croûtée par le vent, de cette petite face nord conclura en beauté (glaciaire) et en pente (raide) cette virée en Vanoise à la rencontre des meilleures conditions de l’hiver… en avril !


Voilà donc également une suggestion de programme pour ton stage intensif de désintoxication aux télébidules évoqué en introduction, suggestion seulement parce que c’est justement cette liberté à la fois encadrée et absolue qui caractérise le ski de randonnée. Absolue, car on peut porter ses skis partout où porte son regard, sans avoir à suivre le fil d’un sentier de randonnée pédestre, le tracé des spits d’une voie d’escalade équipée, les lignes de faiblesse des fissures ou des becquets en escalade « trad »… Encadrée, car cette neige qui peut nous porter a ses propres règles qui apportent des limites à la liberté du skieur, stabilité, qualité… autant d’inconnues qu’on aura à cœur et surtout à cerveau de déchiffrer et d’évaluer. 
Dans une nature d’attestations, de quotas, de forfaits, de pass, de permis et de QR codes, c’est cette liberté même bridée qui devrait finir de te convertir à la conversion et au ski de montagne !

 

EN PRATIQUE

Quand y aller
La meilleure période s’étend généralement de décembre à avril, sachant que les remontées mécaniques fonctionnent en général du début des vacances de Noël à la mi-avril. Avant ou après, les courses situées versant ouest se feront moyennant une dénivelée supplémentaire de 350 à 600 mètres, suivant l’ouverture ou non de la route menant aux Fontanettes, exigeant un départ très matinal au printemps si l’on veut profiter d’une neige cuite à point à la descente. En 2023, le prix du forfait randonneur était de 12 euros pour la montée séquentielle sur les deux télésièges de l’Edelweiss et du Génépi, départ de toutes les courses mentionnées dans cet article à l’exception de la brèche Portetta.
A savoir tout de même que des courses telles que la Grande Casse ou les Dômes de la Vanoise peuvent parfois s’envisager jusqu’à début juin avec des ratios portage/ski acceptables…

Conditions nivo-météorologiques
La Vanoise, bien exposée aux flux de nord et d’ouest, (partiellement) protégée des redoux pluvieux par les Préalpes, bénéficie généralement d’un bon enneigement dès la moyenne montagne. On peut s’en assurer sur la page ad hoc de Meteo France https://meteofrance.com/meteo-montagne/alpes-du-nord/enneigement et appuyer son analyse sur des vues satellite récentes. Le site https://apps.sentinel-hub.com/sentinel-playground permet justement d’estimer la limite d’enneigement grâce aux vues satellites prises périodiquement (généralement tous les 2 ou 3 jours) de l’ensemble de la surface terrestre, en comparant une vue satellite récente (par ciel dégagé) de la montagne visée avec les courbes de niveau d’une carte (par exemple Open TopoMap qui couvre le monde entier, ou plus simplement et précisément IGN pour la Vanoise). Un moyen universel (affranchi de l’existence de stations de ski et/ou bulletins nivologiques) et permanent pour déterminer en temps réel ou presque la présence de neige ou non sur toutes les montagnes du globe !
Sinon les webcams disposées dans la station permet de se faire une idée… ou plutôt une vue de l’enneigement du moment : https://www.pralognan.com/webcams/, l’une à Tignes donnant sur la face nord de la Grande Casse https://tignes.roundshot.com/grande-motte/#/ et ses conditions à vérifier (présence de glace vive ou non…).

 Les bulletins d’estimation du risque d’avalanches sont ceux publiés par Meteo France tous les jours en saison https://meteofrance.com/meteo-montagne/alpes-du-nord/risques-avalanche
Concernant les prévisions météorologiques, on peut comme partout surfer sur www.meteoblue.com, qui compare les sorties de nombreux modèles différents et permet d’évaluer la fiabilité des prévisions au travers de leur dispersion.

Comment y aller
En voiture au bout de la D915 (attention aux tristement célèbres bouchons de la Tarentaise lors des départs et retours du ski des vacances scolaires de Noël et d’hiver, d’autant plus que Pralognan se trouve en amont des trois vallées).
Les départs de randonnée se trouvant tous ou presque dans la station et donc tout près des hébergements, l’utilisation des transports en commun est recommandée : on peut rejoindre en train la gare de Moûtiers Salins située à 27 km, puis gagner Pralognan en bus grâce à une ligne régulière :
https://www.pralognan.com/reservez-votre-sejour/transports/

Où dormir en vallée
Pralognan est une petite station de ski bien différente des grosses stations voisines aux domaines tentaculaires, beaucoup moins fréquentée et coûteuse. Hôtels, résidences de tourisme
https://www.pralognan.com/reservez-votre-sejour/hebergements/ et hébergements locatifs du type airbnb pourront vous accueillir en saison de ski entre décembre et avril, avec certainement des tarifs plus bas après la fermeture des remontées mécaniques mi-avril. 
 

26 novembre 2023 7 26 /11 /novembre /2023 20:35

Ci-dessous le texte - sans les topos - de l'article paru en septembre 2023 sur le ski de rando autour du Cintu :

https://www.skirandomag.com/numero53

Il est un paradis pour les cochons, une terre de liberté sans cages ou barrières dont le nom est chuchoté dans les soues et crié dans les batteries, un pays où les glands se multiplient à portée de groin, où les arbouses tendres et sucrées tombent des branches pour Noël, et où les truies se laissent facilement conter fleurette au bord des départementales. Il est un pays de cocagne pour les skieurs de randonnée, un mirage qui miroite au-delà de la mer depuis les sommets continentaux, une île de granite fauve coiffé de blanc fichée dans la Méditerranée et appelée « Corse ». C’est là que vos yeux cochons pourront reluquer des strings de neige tendus entre les parois de taffoni, là où vous pourrez vous dorer la couenne sur la plage après avoir fait le sanglier dans le maquis et couiné dans la poudreuse ou sur la moquette, là dont vous reviendrez plein les pattes rôtis par le soleil (mais pas transformé.e.s en figatelli ou lonzu).

Et oui, la Corse n’est pas qu’un entrelac de plages où viennent bronzer les bipèdes et de routes où viennent poser les quadrupèdes (vaches, veaux, cochons…) devant les objectifs des pinzuti (touristes continentaux pour les insulaires), mais aussi une île plus riche en montagnes qu’en plaines. C’est une montagne dans la mer rarement esthétique pour les skieurs de randonnée, chaque étage disposant de son petit trésor : la forêt avec ses pins noirs laricios endémiques aux formes torturées, la zone alpine avec ses rocher au granite sculpté en taffoni, et les sommets avec leurs vues panoramiques où l’île d’Elbe, la Sardaigne et/ou le Mercantour peuvent se distinguer derrière la Méditerranée omniprésente. Dans ces contrées insulaires aux toponymes Bocca et Capu chantants, avec des bêtes (semi)sauvages en liberté qui divaguent le long des routes, on profite d’exotisme à moindre bilan carbone, l’occasion de skier vue mer (… et ce parfois de tous les côtés) sous le soleil méditerranéen et non la pluie norvégienne, en dégustant des figatelli plutôt que des cubes de fromage sucré marron et des tubes d’œufs de poissons !

Les montagnes corses profitent d’un enneigement régulièrement satisfaisant à excellent, parfois même supérieur à celui des Alpes ou des Pyrénées - comme notamment durant l’hiver 2023. Les situations météorologiques dites de retour d’est peuvent y déposer des mètres de neige, au point que la seconde avalanche la plus meurtrière recensée en France durant les 200 dernières années a touché le village d’Ortiporio en Castagniccia en 1934 (37 victimes décédées dans un hameau situé à moins de 700 mètres d’altitude - contre 39 morts pour l’avalanche de l’UCPA à Val d’Isère en 1970), ou qu’un derby de ski (sur neige et pas nautique !) est parfois organisé versant nord du Cintu en… juin ou juillet.

Si vous êtes prêt à « prendre le maquis » (ou de préférence la pinède de laricios, qui offre une skiabilité autrement meilleure que les murs impénétrables d’épineux du maquis…), à vous le « hold up » à la Corse ! Inutile d’enfiler votre cagoule et de prendre la pose en brandissant un piolet l’air méchant devant le miroir de la salle de bains, votre rictus effrayant ne sera pas visible sous votre torchon noir mal percé au niveau des yeux, et la lame de votre piolet est moins affûtée que l’épée en plastique de votre fils. Il est plus sage pour votre braquage de simplement prévoir une virée à skis dans la poudreuse des montagnes corses, ce qui pourrait tout de même vous valoir des millions de like enamourés de vos milliers de followers ! 

Trêve de poncifs à réseaux sociaux, cet article vous présente donc des courses réalisables à la journée au départ des routes dégagées en hiver, excluant de fait les parcours au départ de la vallée de la Restonica, dont la route reste officiellement fermée jusqu’à mai. C’est une sélection toute personnelle d’itinéraires choisis pour leur esthétisme mais aussi variété, du maquis de basse altitude aux taffoni des couloirs dans le granite en passant par les forêts de pins laricios, des itinéraires envisageables pour certains dès les premières neiges de la fin de l’automne et pour d’autres jusqu’aux derniers névés des premiers jours de l’été.

Si les caractéristiques de ces courses peuvent diverger suivant les sources, tant pour les pentes (40° d’après IGN, 50° d’après facebook), difficultés (4.2 selon les topos, 4.9.3 selon Emmanuel Macron, 95D selon Dominique Strauss-Kahn, 5.2 à Marseille, 4.256 à Strasbourg, entre le 3.1 et le 5.2 en Normandie), dénivelées (1200 d’après les syndicats, 120 d’après la police) que conditions (5 cm de poudreuse d’après le bulletin d’estimation du risque d’avalanches, 50 cm d’après les réseaux sociaux), vous y trouverez toujours le bonheur évanescent et irréductible aux chiffres d’un claquage de conversion ou d’un rebond dans la poudreuse qui vole autour des skis.

Cima a i Mori
Un itinéraire déjà peu classique en randonnée pédestre mais sans doute rarement skié vu l'altitude basse du départ (700 mètres !) et le caractère peu skiant des 600 premiers mètres de dénivelée, à réserver donc pour le plein hiver avec un enneigement débutant à (très) basse altitude. 
On peut y goûter à skis la substantifique moelle  de la montagne Corse : départ littéralement à travers un beau village Corse perché autour de son église, remontée d’un sentier muletier dans le maquis sous la forêt d’aiguilles de granite de Popolasca et Rundinaia, avant un vallon glaciaire enserré entre les aiguilles creusées de taffoni et d'arches (un petit air de Bavella en Haute-Corse), puis une large combe est plus ouverte et panoramique sur la mer et l’île d’Elbe loin à l’est. De la longueur en montée, descente ou traversée, du dénivelée, du bartassage sur du sentier qui se perd vite dans le maquis, une combe suspendue cachée des regards des « pinzuti », voilà de quoi décrocher votre brevet de randonneur Corse !
 


Forêt de Carrozica
Encore un itinéraire de cœur d’hiver (la partie basse de la montée au Cintu par Bocca Borba) adapté aux situations nivo-météorologiques difficiles, sur des pentes modérées en forêt permettant de progresser sans trop pâtir des visibilités réduites et/ou des risques d’avalanches.
Bien abrité.e.s dans la forêt de bouleaux et de pins noirs, vous profiterez malgré tout d’une superbe ambiance entre laricios enfouis sous la neige et canyons dominés de cascades de glace… et d’une belle descente directe sur la route d’Asco, skiante si tant est que vos traces passent par les clairières, car c’est un boulot délicat que de se frayer un passage à travers les bouleaux !
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Pointe de Cricche, antécime sud-est 
C’est une course classique au départ du col de Vergio, où vous croiserez probablement plus de bipèdes en une journée que durant toute une saison sur les deux autres itinéraires évoqués ci-dessus ! Un itinéraire court par ailleurs, et donc adapté aux créneaux d’une demi-journée par exemple. La pointe de Cricche – ou plutôt son antécime sud-est, le sommet principal étant rocheux - s’atteint par un itinéraire court et direct depuis le col de Vergio, seulement 500 mètres de dénivelée, mais on peut rallonger la balade par une descente versant sud-ouest vers les bergeries de Casterica. On trouvera de très beaux taffoni sur la croupe est dominant le col de Vergio vers la cote 1650, une géojolie qu’il conviendra de décorer à la descente de vos plus belles traces de calligraskie !
 


Punta Minuta 
Place maintenant aux grands sommets corses, avec la Punta Minuta pour commencer, dont la voie normale à skis se déroule sur son versant sud, au départ de Calasima. C’est un beau et long vallon que celui des bergeries de Ballone, sous le versant est de la bien-nommée Grande Barrière, avec comme souvent en Corse de magnifiques exemplaires de pins laricio en haut de la forêt. La montée se fait ensuite plus directe sur une écharpe sud à la pente soutenue, un peu exposée sur le haut sur des pentes convexes au-dessus de barres rocheuses. Une fois parvenus à Bocca Rossa,  la course… se corse encore, et on finit en crampons jusqu’au sommet de la Punta Minuta sur des pentes suspendues. De la croix sommitale on peut distinguer à la fois les sommets sardes au sud… et alpins au nord, la citadelle de Calvi étant quant à elle bien visible au nord-ouest sous les spatules, de quoi donner tout son sens au mot panorama !
 


Paglia Orba 
Un autre grand sommet que la Paglia Orba, montagne emblématique pour sa position – le sommet Corse de plus de 2500 mètres le plus proche de la mer, et sa géologie insolite - un plateau suspendu entouré de falaises de conglomérat sur toutes ses faces, devant le grand rocher de granite troué du Capu Tafunatu. 
La cheminée d’hiver qui mène à ce plateau suspendu s’atteint au départ du col de Vergio par le long vallon du Golo, et passe en crampons par enneigement suffisant, moins couramment à skis à cause de l’étroitesse de ladite cheminée. Plus haut c’est l’enchantement du plateau suspendu avec ses vues plongeantes sur la Méditerranée dorée au sud-ouest, plus sombre à l’ouest vers le Capu Rossu, et la frange blanche des sommets du Mercantour au nord-est. Mais lâchez vos appareils photos, la cheminée d’hiver exposée plein sud n’attendra pas la fin de vos mitraillages pour (mal) tourner en neige trop réchauffée !
 

Couloir ouest de l’antécime nord de la Punta Minuta
Une course magnifique au départ de la station de ski d’Asco, mais qui ne débouche sur aucun sommet majeur, individualisé ou même nommé sur IGN. A quoi bon alors perdre des tonnes de sueur et des hectares de peau des pieds, pour ne même pas pouvoir ajouter une croix significative dans votre carnet de courses ? C’est que ces couloirs offrent aux skieurs une ambiance exceptionnelle, dans leurs lignes encaissées et tournantes, face à la mer et au Mercantour, au-dessus des abîmes du Cirque de la Solitude (désormais évité par le GR20). Comme souvent en Corse, au-delà de leur cargaison de poudreuse, les tempêtes hivernales plâtrent de neige et glace les parois sommitales, de quoi transformer cette montagne en un petit Cerro Minuta aux allures patagoniennes, avec vue panoramique sur les mers australes euh… la mer Méditerranée ! 
Les sorties post méridiennes dans ce couloir exposé à l’ouest se verront agrémentées de nombreuses chutes de glace accrétée détachée par le soleil, casque (encore plus) de rigueur pour les intrépides skieurs. Avec les parois au-dessus qui tiendront donc lieu de machine à glaçons, il suffira d’emmener une bouteille de grappa pour célébrer dignement la beauté du ski corse, la mer sous les spatules assurant l’ambiance d’un bar de plage ! Le trait de côte s’avère heureusement ici assez lointain pour que les bulldozers préfectoraux ne viennent pas détruire votre paillote de plage installée sur un domaine public maritime…
 

Bocca Pampanosa
Depuis la station de ski d’Asco le cirque nord de Trimbolacciu attire le regard des skieurs et alpinistes avec ses grands couloirs nord enserrés entre les tours rocheuses, celui de Bocca Pampanosa étant le plus évident entre les Capu Larghia et Rossu. Au-delà d’une grande ambiance alpine sur ses 600 mètres de dénivelée, il offre un enneigement exceptionnellement abondant et tardif de par son altitude et encaissement au nord sous d’immenses parois de granite, et conserve souvent de grands névés jusqu’au cœur de l’été, de quoi être en mesure d’enchaîner virages à skis le matin et ploufs dans une mer à la température estivale l’après-midi ! 
 

EN PRATIQUE

Période
La meilleure période du ski corse ne diffère pas beaucoup de celle des Alpes du Sud ou des Pyrénées, et s’étend généralement de décembre à avril, à mon sens pas plus tard que la mi-avril pour garantir un ratio ski/portage raisonnable sur ces montagnes d’altitude moyenne (pas plus de 2700 mètres), méridionales et aux départs jamais très hauts (pas plus de 1400 m).
A savoir tout de même que des courses telles que la Bocca Pampanosa par son couloir nord peuvent généralement se pratiquer au début de l’été avec seulement une petite heure de portage !


Estimation et prévision des conditions nivo-météorologiques
Comme expliqué en introduction, l’enneigement des montagnes corses est souvent généreux, mais il présente une grande variabilité temporelle et spatiale. Il importe donc de vérifier si la neige est assez présente avant de traverser la Méditerranée : on peut s’assurer de l’enneigement sur la page ad hoc de Meteo France https://meteofrance.com/meteo-montagne/corse/enneigement
On peut également appuyer son analyse sur des vues satellite récentes. Le site https://apps.sentinel-hub.com/sentinel-playground permet justement d’estimer la limite d’enneigement grâce aux vues satellites prises périodiquement (généralement tous les 2 ou 3 jours) de l’ensemble de la surface terrestre, en comparant une vue satellite récente (par ciel dégagé) de la montagne visée avec les courbes de niveau d’une carte (par exemple Open TopoMap qui couvre le monde entier, ou plus simplement et précisément IGN pour la Corse). Un moyen universel (affranchi de l’existence de stations de ski et/ou bulletins nivologiques) et permanent pour déterminer  en temps réel ou presque la présence de neige ou non sur toutes les montagnes du globe !
Sinon les webcams disposées dans les stations de ski (par exemple celles d’Asco, Ghisoni ou Val d’Ese) ou les cols de montagne (Vizzavona) permettent de se faire une idée… ou plutôt une vue de l’enneigement du moment : http://actu-meteo-corse.fr/webcams-de-corse 

Les bulletins d’estimation du risque d’avalanches sont ceux publiés par Meteo France tous les jours en saison https://meteofrance.com/meteo-montagne/corse/risques-avalanche

Concernant les prévisions météorologiques, on peut comme partout surfer sur www.meteoblue.com, qui compare les sorties de nombreux modèles différents et permet d’évaluer la fiabilité des prévisions au travers de leur dispersion.


Comment y aller
L’insularité impose soit l’avion - Ajaccio, Calvi ou Bastia sont les aéroports Corses les plus commodes vis-à-vis des courses présentées dans cet article, soit le ferry – sur le continent au départ de Marseille, Toulon ou Nice et à destination d’Ajaccio, l’Ile-Rousse ou Bastia. La comparaison des tarifs attachés à ces moyens de transport doit évidemment prendre en compte la location de voiture si l’on choisit l’avion.

Se déplacer
Il semble difficile de se passer de (location de) voiture, les points de départ des randonnées présentées dans cet article n’étant en général pas ou mal desservis par les transports en commun.

Budget/hébergement
La Corse est une destination peu courue et plutôt bon marché entre décembre et avril en saison de ski, qui a le bon goût de ne pas recouper la haute saison balnéaire de mai à septembre, en hiver heureusement moins de Celsius et de gus !

6 octobre 2023 5 06 /10 /octobre /2023 15:30

Dans le numéro 53 de Ski Rando Magazine qui vient de paraître en ce début octobre 2023, deux articles sur les voyages ski de la saison dernière et une vingtaine de pages de ma "prose" (et mon appareil photo !) : la Corse au coeur de l'hiver et la Vanoise au début du printemps, les 2 en poudreuse mais dans des ambiances évidemment bien différentes :

https://www.facebook.com/skirandomag?locale=fr_FR

https://www.skirandomag.com/2023/06/13/corse-ski-de-rando-autour-du-cintu/

https://www.skirandomag.com/2023/06/16/pralognan-la-vanoise-version-ski-rando/

Disponible en version papier en kiosque ou en commande, en version digitale en téléchargement :

https://www.skirandomag.com/ou-trouver-le-numero-53

le ski de rando en Corse et Vanoise en magazine
le ski de rando en Corse et Vanoise en magazine
5 juillet 2023 3 05 /07 /juillet /2023 17:09

Bientôt dans Speleo Magazine (numéro 122 de juin 2023) un article de Philippe A. sur la grotte aux méduses « découverte » en 2018, et dont l’exploration s’est (vite !) achevée en mai 2023, une des plus belles grottes marines concrétionnées de la côte méditerranéenne française.

https://www.facebook.com/speleomagazine/

L'article de Guillaume, très sympathique BE canyon et kayak dont je partage l'éclectisme et un penchant pour l'exploration, sur son blog : https://canyonisme.net/2023/06/07/grottes-des-meduses/

 la grotte aux méduses, l’article
5 juillet 2023 3 05 /07 /juillet /2023 17:07

Bientôt dans Ski Rando Magazine et dans vos kiosques un article sur le ski de randonnée en Vanoise autour de Pralognan, inspiré de différentes virées sur place dont, une (petite) semaine de ski de (grosse) poudreuse en avril 2023 :

« Tu es un.e junkie du ski mécanisé ? Un.e boulimique des télé-bidules qui te propulsent en quelques minutes en haut de la piste rouge des chamois de Super-Truc-les-Alpes pour la descendre à la chaîne ? Avec la fermeture des stations de ski, hauts lieux de transmission du covid dans leurs espaces plus fermés et bondés que les grandes surfaces, le funeste mois de mars 2020 t’a brutalement sevré. Tu cherches un moyen de ne pas reproduire ta crise de manque, si jamais les agents pathogènes venaient encore infester les barres de télésiège et perches de téléskis ?

Il est du ski envisageable sans pylône, le ski dit de randonnée, le meilleur traitement de substitution pour traiter ton addiction ! Par contre je ne vais pas te jeter directement en pâture aux ours blancs, panthères des neiges et autres gendarmes qui verbalisent à plus d’un kilomètre du domicile, mais te proposer plutôt un sevrage en douceur à… Pralognan-en-Vanoise, une station qui t’offrira encore une poignée de remontées mécaniques et des restes de civilisation : restaurants, bars… mais sans l’option dance floor à ciel ouvert sur plancher chauffant. Car au-delà des domaines skiables tentaculaires, Espace Killy et autres Paradiski qui ont fait fleurir les télésièges sur bon nombre d’alpages de Haute-Tarentaise, on trouve encore ici, dans cette frange ouest du parc national de la Vanoise, plus d’épicéas que de pylônes. Tu pourras commencer ta cure de désintoxication par le petit bip rassérénant du forfait en bas de la remontée, avant de coller tes scalps de pinnipède sous les skis pour partir dans la terra incognita hivernale, son silence pesant et sa solitude.

[…] »

 

 

ski de rando autour de Pralo, l’article

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